Quand un homme chute, il laisse derrière lui une trace. Mais quand un héros trahi renaît dans la fureur, c’est l’histoire entière qui tremble. The First Berserker: Khazan, développé par Neople et sorti sur Xbox Series le 27 mars 2025, n’est pas un récit de gloire. C’est un chant de guerre étranglé par le ressentiment, une descente aux enfers dans les ruines d’un monde rongé par les conspirations.
Spin-off brutalement autonome de l’univers de Dungeon & Fighter, ce souls-like coréen vous fait incarner Khazan, ancien héros devenu paria, hanté par le poids de sa déchéance. Il ne s’agit pas ici de sauver le monde. Seulement de retrouver ce qu’on vous a arraché : votre nom, votre honneur, votre chair.
Mais derrière ses airs de vengeance mythologique et ses lames démesurées, The First Berserker: Khazan peut-il s’élever parmi les géants du genre ? Ou ne fait-il que mimer la souffrance, sans en maîtriser la profondeur ?
Les cendres d’un empire et la voix d’un condamné
La légende de Khazan ne commence pas dans la lumière, elle s’effondre dans le sang. Général adulé du royaume d’Arad, symbole vivant de puissance et de loyauté, Khazan est spolié, accusé de trahison et exécuté sans procès. Mais les dieux ne l’ont pas abandonné. Ou peut-être l’ont-ils maudit : il revient, mutilé, possédé, consumé par une rage qu’aucune armée ne pourra plus contenir.
Ce n’est pas une quête de justice. C’est une quête de mémoire. The First Berserker: Khazan vous plonge dans un univers torturé où les souvenirs de gloire sont défigurés par le doute. Chaque fragment narratif — inscriptions, cutscenes, monologues intérieurs — reconstruit l’identité d’un homme dont le nom est devenu tabou.
L’écriture du jeu, inspirée par les canons du souls-like, privilégie l’ellipse, la suggestion, la symbolique. Aucun exégète ne viendra vous expliquer la trahison de Khazan dans un long dialogue. Il faudra le lire dans les fresques effacées, les visions fragmentées, les ruines dévastées. C’est un récit en pièces détachées, offert à votre propre interprétation.
Khazan lui-même n’est pas un avatar neutre. Il parle. Il gémit. Il se souvient. Son corps garde les stigmates de sa trahison : chaînes, cicatrices, malédictions. Mais sa voix intérieure, grondante et rauque, porte un désespoir lucide. Il ne cherche pas la grandeur. Seulement la fin.
Les personnages secondaires, eux, sont rares, distants, et souvent ambigus. Le jeu ne distribue pas d’alliés évidents. Ceux que vous croisez ont tous leurs propres blessures, leurs propres versions du passé. Et dans cette cacophonie de vérités déformées, la vôtre est toujours sujette à caution.
Le monde d’Arad, déjà connu des fans de Dungeon & Fighter, est ici transfiguré : plus sombre, plus froid, comme vu à travers les yeux d’un revenant. Rien n’est intact. Tout est ruine, rancune, et mensonge. Et dans ce décor où plus rien n’a de sens, le récit devient un poids, une question lancinante : Khazan est-il encore un homme, ou seulement un instrument de destruction ? The First Berserker: Khazan ne raconte pas une histoire. Il vous la fait porter. Et à chaque pas, c’est votre propre jugement que le jeu rouvre… à la hache.
La rage comme dogme, la violence comme système
Dans The First Berserker: Khazan, on ne danse pas avec la mort mais on la martèle jusqu’à ce qu’elle cède. À rebours des souls-like traditionnels qui privilégient l’esquive fine et l’observation patiente, le système de combat ici repose sur la pression continue, l’agressivité maîtrisée et une lecture punitive de la faille adverse.
Chaque coup porté par Khazan a du poids, une lenteur mesurée, un impact brutal. Le gameplay se structure autour de combos simples en surface, mais hautement optimisables grâce à des fenêtres d’animation, des capacités d’enchaînement, et un système d’overdrive qui transforme la rage accumulée en assauts frénétiques. Ce n’est pas la dextérité qui est récompensée, c’est l’acharnement réfléchi.
Le jeu adopte une structure en niveaux fermés et linéaires, avec des bifurcations optionnelles, des zones secrètes, et un système de checkpoints à la bonfire. L’exploration n’est pas l’axe principal, mais elle existe. On y trouve des fragments narratifs, des équipements et des échos du passé. Chaque environnement est pensé comme un tableau de souffrance, avec des ennemis disposés pour punir l’imprudence ou la répétition.
Les boss, quant à eux, sont le cœur du système. Mises en scène spectaculaires, patterns lisibles mais féroces, et surtout des mécaniques propres à chacun, qui exigent souvent plusieurs tentatives avant de saisir la logique du combat. Ici, l’erreur n’est pas tolérée. Et la victoire ne vient jamais sans sueur.
L’arbre de compétences, bien que réduit en apparence, permet une personnalisation profonde : postures alternatives, attaques spéciales à débloquer, améliorations passives. Mais il ne s’agit jamais d’une progression de confort. Chaque talent acquis change votre rapport à la violence, affine vos timings, ou vous pousse à adopter une autre stratégie. C’est un build systémique, pas cosmétique.
L’intelligence artificielle des ennemis est correcte, mais ne surprend pas. Leur danger vient de leur placement, de leur nombre, de leur type. Khazan est souvent mis en difficulté non par leur ruse, mais par leur résistance et leur brutalité cumulative. Le jeu sait créer la tension mais il ne renouvelle pas sa grammaire.
Les environnements eux-mêmes souffrent d’un manque de verticalité ou de rythme spatial. L’enchaînement salle couloir arène reste trop fréquent. Et si les variations visuelles existent, elles n’atteignent jamais l’ingéniosité d’un FromSoftware.
Mais malgré ses failles, The First Berserker: Khazan impose une vision claire du combat. Une rage méthodique, où chaque pas est un avertissement, chaque frappe une exécution. Et dans ce monde qui ne pardonne rien, la moindre faiblesse devient enseignement.
Couleurs d’entrailles et grondement d’acier
L’univers de Khazan ne se contemple pas, il s’encaisse. Le ton visuel est donné d’entrée : dominantes rougeâtres, ruines fêlées, mondes éventrés par la trahison et la guerre. Il n’y a pas de lumière naturelle dans The First Berserker: Khazan, seulement des reflets ternis, des torches qui saignent, des architectures en agonie. L’esthétique n’est pas gothique : elle est barbare, écrasée, brutale.
Les modèles 3D sont solides, sans génie formel mais dotés d’une identité forte. Khazan, en particulier, impose une présence viscérale. Ses animations sont lourdes, fragmentées, volontairement brutes; comme si son propre corps était en guerre contre lui-même. Chaque mouvement est une douleur maîtrisée, chaque posture un rappel de ses mutilations passées.
Les ennemis, eux, bénéficient d’une variété correcte : soldats grotesques, abominations mutantes, spectres martyrisés; mais leurs animations sont rigides, et certains modèles sont réutilisés trop fréquemment sur la longueur. C’est un bestiaire fonctionnel, mais pas révolutionnaire.
Les effets visuels, notamment en combat, accentuent la sensation de lourdeur et de poids. Les éclats de sang, les gerbes d’énergie sombre, les pulsations de rage s’affichent sans retenue. Le HUD, épuré, souligne la tension sans gêner la lecture, mais les effets de surcharge à l’écran en mode overdrive peuvent nuire à la lisibilité.
Le jeu tourne en 60fps sur Xbox Series X avec des performances stables, et en 30fps sur Series S, sans chute majeure ni tearing notable. Les temps de chargement sont courts, les transitions entre zones fluides. Sur le plan technique brut, le jeu est maîtrisé.
Côté bande-son, la proposition est aussi viscérale que la direction artistique. Percussions tribales, nappes distordues, grondements métalliques : Khazan n’a pas de thème mémorable, mais une ambiance sonore constante, tendue, granuleuse. Les combats sont soutenus par des compositions martelées, sans mélodie, juste du rythme et de la fureur.
Les bruitages sont particulièrement réussis. Chaque impact de lame, chaque gémissement de Khazan, chaque explosion magique résonne avec violence. Les doublages, en revanche, sont limités : si la voix de Khazan convainc par sa rugosité hantée, les autres personnages sont plus inégaux, et certains dialogues secondaires manquent d’intensité dramatique.
The First Berserker: Khazan ne cherche pas à être beau. Il cherche à marquer. À encrer chaque lieu dans une mémoire douloureuse, chaque son dans une pulsation vengeresse. Et dans ce rôle-là, il frappe juste et fort.
Système d’épreuve, confort de rigueur
Du côté technique, The First Berserker: Khazan offre une expérience stable et fluide sur Xbox Series. Le jeu tourne en 60 images par seconde sur Series X, en 30fps verrouillés sur Series S, sans chutes marquées, ni ralentissements en combat; même lors des affrontements de boss ou dans les zones chargées d’effets. Les temps de chargement sont brefs, et les transitions entre les zones se font sans accroc. L’optimisation est solide.
En revanche, aucune option graphique n’est disponible : pas de réglage de résolution dynamique, ni de filtres visuels. L’image est figée dans une présentation propre mais non modifiable; ce qui conviendra aux joueurs console, mais peut frustrer les amateurs de personnalisation.
Les contrôles à la manette sont précis et bien pensés. Les attaques, les esquives, les postures alternatives, les sorts spéciaux : tout répond avec nervosité. Le système de verrouillage des ennemis est efficace, même si la caméra peut parfois s’accrocher sur des éléments parasites dans les zones fermées. Rien de rédhibitoire, mais des ajustements seraient bienvenus.
Côté accessibilité, le jeu fait des concessions originales. Il existe un mode de difficulté “facile” qui bloque les trophées, des paramètres d’aide ou d’assistance à la visée; mais les textes, bien que lisibles, ne sont pas redimensionnables. Pas de mode daltonien, pas de filtre auditif.
L’interface est claire : menus lisibles, navigation fluide.La progression est balisée sans être directive, avec un système de quêtes secondaires très limité, mais quelques PNJ optionnels viennent proposer du lore ou des récompenses.
La rejouabilité est modérée. Un New Game+ est bien présent, avec des ennemis plus résistants et quelques ajustements de placement, mais aucune modification majeure de structure. Les builds alternatifs offrent de quoi expérimenter, mais la progression reste globalement identique.
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