Chronomètre au sabre, automatisme à la louche
Sushi Bar Express repose sur un gameplay ultra-fonctionnel, pensé pour des sessions courtes, nerveuses, sans apprentissage progressif. Vous êtes face à un comptoir, des ingrédients défilent, des commandes apparaissent en haut de l’écran et vous devez assembler les bons sushis, dans le bon ordre, avant que la patience des clients ne s’effondre.
La structure est simple, presque brutale : chaque niveau est un sprint. Pas de pause, pas d’ajustement. Vous devez mémoriser les recettes, combiner riz, poisson, wasabi, algues, œufs de saumon, dans des séquences de plus en plus complexes, tout en évitant les erreurs de manipulation.
Le jeu propose une quarantaine de plats différents, avec un système de déblocage progressif. Mais au-delà de la variété, c’est la cadence qui crée la tension. La marge d’erreur est faible. Une mauvaise touche, une erreur de timing, et le client s’énerve, part, fait baisser votre score. Le stress est constant. Et il ne vient pas de l’interface, mais du tempo.
Le level design ne varie jamais vraiment. Chaque niveau est une variation du même décor fixe, avec une montée de complexité plus qu’un changement de structure. Il n’y a ni nouvelle cuisine, ni salle secondaire, ni client à personnalité. Tout passe par l’intensité croissante, jamais par la surprise.
Côté ergonomie, le jeu est parfaitement jouable à la manette, mais son héritage mobile est évident. Les commandes sont parfois trop sensibles, les enchaînements manquent de feedback clair, et l’absence de mode tactile sur Switch est une occasion manquée.
Pas de tutoriel détaillé, pas de système d’aide, pas de possibilité d’adapter la difficulté. Le jeu s’adresse directement à ceux qui aiment l’urgence. Les autres décrocheront dès les premières erreurs.
Et surtout : aucun mode de jeu alternatif. Pas de contre-la-montre, pas de mode zen, pas de défi thématique. Une fois qu’on a vu les premières 20 minutes, le reste n’est qu’accélération. Pas transformation.
Sushi Bar Express ne trahit jamais sa promesse. Mais il l’exécute de façon brute, répétitive, sèche. Un gameplay tendu comme un tendon, sans saveur ajoutée.
Cuisine statique, bruit de service continu
Visuellement, Sushi Bar Express est un jeu fonctionnel, presque dépouillé, à la frontière entre le jeu Flash du début des années 2000 et l’application mobile à petit budget. Les graphismes sont colorés, lisibles, mais sans style marqué. Les ingrédients sont immédiatement reconnaissables, les plateaux bien agencés, mais l’ensemble manque cruellement de personnalité visuelle.
Les clients sont des silhouettes stéréotypées, animées de manière sommaire. Aucune expression faciale , aucune interaction visuelle marquante : ils apparaissent, attendent, râlent ou partent. Le comptoir ne change jamais. Le décor est figé. Aucune évolution au fil de la progression, aucun effet visuel spécial ne vient souligner votre montée en compétence.
Les animations sont minimales : on clique, ça bouge, ça s’enclenche. Les gestes sont automatiques, sans geste culinaire, sans esthétique du mouvement. Le sushi, ici, n’est pas sublimé. Il est exécuté.
Côté bande-son, l’expérience est tout aussi minimaliste. Une boucle musicale vaguement inspirée du Japon traditionnel tourne en fond, accompagnée de sons de cuisine standard : coupes, bip, cliquetis d’assiettes. Rien d’agaçant, mais rien de mémorable. Le son est là pour ne pas être absent.
Aucun travail de sound design n’accompagne la montée de tension. Pas de variation musicale en fonction du score ou du temps restant. Aucun effet marquant pour souligner un combo réussi ou une commande ratée. Le jeu reste plat, sonorement comme visuellement.
Enfin, le jeu ne propose aucune option audio avancée. Impossible de désactiver certaines pistes, de régler les effets indépendamment. Tout est binaire : actif ou non.
Sushi Bar Express aurait pu sublimer la frénésie de la cuisine par une esthétique stylisée, un sens du rythme sonore, un grain visuel marquant. Il se contente de rester lisible. Et dans un genre saturé, la lisibilité seule ne suffit plus.
Service minimum, garniture absente
Sur Nintendo Switch, Sushi Bar Express tourne sans accroc. Les chargements sont quasi-instantanés, la fluidité est constante, et le jeu ne souffre d’aucun bug technique notable. Mais au-delà de cette stabilité bienvenue, rien n’a été pensé pour exploiter les possibilités de la console.
Pas de tactile en mode portable. Pas de vibrations HD. Pas de gimmick Nintendo. Le jeu ne propose ni mode coopératif local, ni online, ni même un classement des scores mondiaux. L’expérience est purement solo, purement locale, purement linéaire.
Du côté des contenus supplémentaires : rien. Aucun DLC, aucun ajout post-lancement prévu, aucun événement in-game. Le jeu est un bloc figé, livré tel quel, sans ambition d’évolution. Une fois les niveaux terminés, il ne reste que la répétition brute.
L’absence de système de notation fin (combo, style, perfection…) empêche toute optimisation fine du gameplay. Vous terminez une session avec un score, mais rien ne vous incite à recommencer autrement. Aucun système de défi, aucune carotte pour améliorer votre maîtrise.
Côté accessibilité, Sushi Bar Express ne propose aucune option spécifique. Pas de réglage de vitesse, pas de mode entraînement, pas d’interface simplifiée. Le jeu ne tolère ni lenteur ni maladresse — et n’aide jamais à progresser. Même les textes explicatifs sont rares, souvent limités à l’écran de chargement.
Il en résulte un jeu fermé sur lui-même, qui propose un système clair, rapide, fonctionnel… mais sans souplesse, sans modularité, sans extension.
0 commentaires