Développé par tri-Ace et publié par Square Enix, Star Ocean: The Divine Force est le sixième opus majeur de la série Star Ocean, sorti ce 27 octobre 2022 sur Xbox Series. Ce nouvel épisode ambitionne de revitaliser la franchise en proposant une aventure mêlant science-fiction et fantasy, tout en introduisant des mécaniques de jeu innovantes. Mais parvient-il à répondre aux attentes des fans et à séduire les nouveaux venus ?
Un choc des mondes
L’univers est vaste, impitoyable, et Raymond Lawrence en fait l’amère expérience. Capitaine d’un vaisseau marchand, il pensait mener une mission de routine avant que la Fédération Pangalactique ne le prenne en chasse. Un assaut soudain, une fuite désespérée, puis un crash sur un monde où la science et la technologie ne semblent être que des mythes. Aster IV. Une planète figée dans un âge médiéval, où la politique se joue sur le fil de l’épée et où les conflits ne se résolvent pas dans le vide intersidéral, mais sur des champs de bataille gorgés de sang et d’honneur. Raymond, naufragé malgré lui, se retrouve projeté dans une lutte de pouvoir qui le dépasse, mais dont il pourrait bien devenir la clé.
C’est ici qu’il rencontre Laeticia Aucerius, héritière du royaume d’Aucerius, une princesse plus guerrière que diplomate, bien décidée à défendre son peuple contre une menace qui grandit dans l’ombre. Deux êtres que tout oppose : lui, marchand de l’espace à la morale flexible, elle, figure royale élevée dans le devoir et la droiture. Et pourtant, le destin les pousse à s’unir, car si Aster IV est un monde à la technologie limitée, les tensions qui s’y trament pourraient avoir des répercussions bien au-delà de ses frontières.
Star Ocean : The Divine Force joue sur cet éternel contraste entre science-fiction et fantasy, entre avancées technologiques et traditions figées. Mais plus encore, il place le joueur face à un choix fondamental : suivre l’histoire à travers les yeux de Raymond, l’homme venu des étoiles, ou à travers ceux de Laeticia, la princesse guerrière qui voit son monde vaciller sous l’influence d’une puissance qu’elle ne comprend pas encore.
Une guerre ne se gagne jamais seul. Au fil de leur périple, Raymond et Laeticia vont croiser des alliés aussi improbables que fascinants, chacun portant son propre fardeau, chacun apportant sa propre force au combat. Elena, seconde du capitaine Lawrence, est bien plus qu’un officier méthodique. Sa loyauté envers son capitaine est inébranlable, mais son regard froid et analytique cache des dilemmes qui la rendent plus humaine qu’elle ne l’admettrait. Albaird Bergholm, chevalier et protecteur personnel de Laeticia, observe d’un œil méfiant ce mercenaire tombé du ciel. Si sa maîtrise des arts martiaux et de la magie offensive fait de lui un combattant redoutable, son attachement à sa princesse le pousse à des décisions dictées plus par l’émotion que par la raison.
Mais les alliances ne sont jamais figées. Les choix du joueur déterminent qui rejoindra cette croisade interstellaire. Certains visages se révéleront des soutiens inébranlables, d’autres masqueront des intentions plus troubles. Chaque rencontre est une pièce de plus dans un puzzle dont l’issue demeure incertaine. Comme toujours dans Star Ocean, le jeu ne se contente pas d’opposer des factions : il interroge. L’influence d’une civilisation avancée sur un monde sous-développé est-elle une bénédiction ou une malédiction ? L’arrivée d’une technologie supérieure apporte-t-elle la paix ou la discorde ? Les hommes sont-ils destinés à répéter les erreurs du passé, qu’importe la puissance qu’ils détiennent ?
The Divine Force pousse le joueur à s’interroger sur la notion d’ingérence, sur les responsabilités d’un peuple face à un autre, sur la frontière fragile entre l’aide et la domination. Dans un monde où les lames s’entrechoquent encore sur le champ de bataille, l’apparition d’une technologie capable de briser des empires en un instant pourrait bien être la plus grande menace de toutes. Et pourtant, ce ne sont pas les machines qui mènent les guerres. Ce sont les hommes et les femmes qui les contrôlent.
Une épopée galactique plus fluide et plus ambitieuse
Star Ocean a toujours cherché à marier exploration et combats en temps réel, à mélanger la science-fiction et la fantasy, et à offrir des affrontements à la fois dynamiques et stratégiques. Mais avec The Divine Force, la formule change de cap. Plus rapide, plus ouverte, plus audacieuse, elle réinvente les bases du gameplay tout en respectant l’héritage de la série. Oubliez les arènes cloisonnées des anciens opus. Ici, le champ de bataille est sans limite, offrant une fluidité et une intensité jamais atteintes dans la saga. Les affrontements se déroulent en temps réel, permettant de jongler entre les personnages, d’enchaîner combos et attaques spéciales, et d’exploiter les points faibles ennemis.
Mais le véritable atout du système de combat, c’est DUMA. Ce drone polyvalent accompagne les héros et leur confère une mobilité hors normes. Grâce à lui, les combats prennent une nouvelle dimension. Raymond bondit dans les airs pour surprendre un ennemi, Laeticia fonce à pleine vitesse vers un point stratégique, Albaird exécute des manœuvres impossibles. Chaque affrontement devient un ballet aérien où l’esquive et l’anticipation sont aussi importantes que la puissance brute. Et ce n’est pas juste un gadget : les mécaniques de combat tournent autour de cet outil, forçant à revoir les stratégies traditionnelles de la série. Ne plus se contenter d’attaquer de front, mais utiliser le terrain, exploiter la verticalité, transformer chaque combat en un affrontement aussi spectaculaire que tactique.
Aster IV n’est pas une succession de couloirs déguisés en fausses étendues. C’est un monde vivant, vaste, où chaque recoin cache un secret, une ressource, un ennemi à affronter. Contrairement aux anciens opus, The Divine Force ne limite pas les déplacements à des zones fermées. Avec DUMA, l’exploration prend une autre dimension. Fini les trajets linéaires, place à la liberté totale. Les falaises, les ruines, les villes regorgent de passages cachés, de hauteurs inaccessibles autrement. Et tout cela a une raison d’être. Chaque détour peut mener à des trésors cachés, à des quêtes secondaires enrichissantes, à des défis supplémentaires. Loin d’être un simple gimmick, cette liberté de mouvement change radicalement l’approche du level design.
La progression des personnages repose sur un système de grille de compétences, inspiré des RPG classiques mais avec une flexibilité inédite. Chaque personnage peut évoluer selon les choix du joueur, développant des aptitudes qui correspondent à son style de combat. Et ce n’est pas tout. L’artisanat fait son grand retour, permettant de créer des armes et objets uniques, un clin d’œil aux anciens opus qui ravira les amateurs de customisation poussée. Loin d’être un simple ajout cosmétique, ce système permet de modifier profondément la manière dont chaque héros évolue au fil de l’aventure.
Mais The Divine Force ne se résume pas qu’à son histoire principale. En parallèle du récit, un mini-jeu fait son apparition : E’sowa. Un jeu de plateau où les joueurs collectionnent des pions représentant des personnages emblématiques de la série. Plus qu’une simple distraction, E’sowa est un défi stratégique, un moyen de gagner des récompenses précieuses et de prolonger l’aventure d’une autre manière. Avec son système de collection et d’évolution, il apporte une touche supplémentaire à une expérience déjà riche en contenu.
Star Ocean: The Divine Force ne réinvente pas totalement la formule, mais il l’adapte, la fluidifie, la rend plus nerveuse et plus immersive. Le système de combat, l’exploration libre et les mécaniques de progression offrent une expérience plus moderne et plus engageante, sans pour autant renier ce qui fait l’essence de la série. Avec cette refonte intelligente, Star Ocean ne se contente pas d’être un RPG de plus. Il veut prouver qu’il a encore sa place dans la constellation du J-RPG moderne.
Un univers coloré qui vacille entre ambition et limites techniques
Star Ocean a toujours cherché à marier exploration et grandeur spatiale. The Divine Force, avec ses vastes environnements et son ambition visuelle renouvelée, tente de suivre cette tradition. Mais si l’horizon semble infini, la réalité est plus contrastée. Aster IV impose son atmosphère. Les plaines s’étendent à perte de vue, les cités aux architectures médiévales se dressent fièrement sous un ciel vibrant de couleurs, et les cavernes renferment des secrets anciens.L’exploration verticale, rendue possible grâce à DUMA, permet de contempler ces paysages sous un nouvel angle, offrant une véritable liberté de mouvement.
Mais l’enchantement est parfois brisé par un manque de finesse dans les détails. Si la direction artistique est inspirée, la technique peine à suivre. Certaines textures restent grossières, les décors manquent de vie, et les environnements vastes donnent parfois une impression de vide. Les limitations budgétaires de tri-Ace se font ressentir, notamment lorsqu’on compare le jeu à d’autres productions récentes du genre. Et puis, il y a les visages. Magnifiquement dessinés en artwork, mais rigides en jeu, les personnages souffrent d’animations faciales limitées, donnant à certaines scènes un air étrange, presque artificiel. Les émotions peinent à s’exprimer pleinement, laissant parfois une impression de distance entre le joueur et l’histoire qu’il vit.
Dès les premières notes, on reconnaît immédiatement la patte de Motoi Sakuraba. Des envolées orchestrales aux morceaux électroniques plus nerveux, la musique de The Divine Force sait accompagner les moments clés de l’aventure. Les thèmes de combat, en particulier, brillent par leur intensité. Ils apportent une énergie supplémentaire aux affrontements, rendant chaque duel plus épique qu’il ne l’est déjà. Certains morceaux d’exploration parviennent également à créer une ambiance envoûtante, accentuant le sentiment de grandeur et de mystère. Mais sila bande-son sait capter l’attention, elle peine parfois à s’imposer. Certains morceaux se fondent trop dans l’arrière-plan, manquant de cette puissance mémorable qui fait qu’un thème reste gravé dans l’esprit du joueur. Là où d’autres jeux de la saga avaient su imposer des compositions marquantes, The Divine Force reste plus timide, moins audacieux.
Les effets sonores, eux, sont globalement réussis. Les coups d’épée résonnent avec force, les sorts magiques explosent avec un impact satisfaisant, et l’ambiance des villes et des zones de combat est immersive. Mais comme pour les graphismes, quelques incohérences viennent perturber l’expérience. Certains dialogues souffrent d’un mixage étrange, avec des voix qui semblent parfois décalées par rapport à l’action ou trop étouffées.
The Divine Force n’est pas un jeu laid, loin de là. Il regorge d’idées visuelles, de paysages somptueux et d’une bande-son qui sait, par moments, captiver. Mais c’est aussi un jeu qui lutte contre ses propres limites, qui oscille entre grandeur et concessions techniques. L’exploration est grisante, mais parfois freinée par des décors moins détaillés. Les personnages sont fascinants, mais leurs animations figées nuisent à l’impact émotionnel des dialogues. La musique accompagne parfaitement l’aventure, mais manque d’un éclat mémorable qui aurait pu la rendre inoubliable.
Star Ocean: The Divine Force offre une expérience audiovisuelle en dents de scie. Un jeu qui impressionne autant qu’il frustre, qui alterne entre génie artistique et imperfections techniques. Mais pour ceux qui sauront fermer les yeux sur ces défauts, l’univers qu’il propose vaut amplement le voyage.
0 commentaires