Un carnet effacé, une île à redécouvrir, un grand-père qui oublie : jusqu’où irez-vous pour raviver les souvenirs d’un être cher ? Développé par Xelo Games et édité par SOEDESCO, Petit Island est disponible depuis le 14 novembre 2024 sur Nintendo Switch. Ce jeu d’aventure narratif en monde ouvert vous invite à incarner Lily, une jeune chatte anthropomorphe, déterminée à reconstituer les souvenirs de son grand-père en explorant l’île de son enfance.
Lily se lance dans une quête émotive, armée de son appareil photo, pour capturer les lieux et moments qui ont marqué la jeunesse de son grand-père. Chaque cliché, chaque rencontre avec les habitants de l’île, contribue à raviver les pages effacées de son journal. Mais au-delà de cette mission, c’est une exploration de la mémoire, de la famille et du temps qui passe que propose Petit Island.
Dans un paysage vidéoludique où les jeux “cozy” se multiplient, Petit Island se distingue-t-il par sa sincérité et son approche touchante de la nostalgie ? Ou se perd-il dans une mer de titres similaires, sans parvenir à émerger ? C’est ce que nous allons découvrir.
Journal effacé, passé recomposé
Il n’y a pas de tragédie dans Petit Island. Pas de fin du monde à éviter, ni de combat à livrer. Seulement une mémoire vacillante, celle d’un grand-père qui oublie, et une petite-fille qui cherche à lui rendre ce que le temps efface. C’est une histoire sans conflit, mais pleine d’enjeux.
Lily, jeune exploratrice féline, arrive sur une île luxuriante avec un objectif simple : remplir un album photo. Mais chaque cliché est un fragment narratif, chaque panorama retrouvé, une page restaurée dans le journal de son grand-père. Le jeu ne vous donne pas de mission héroïque. Il vous donne une mission intime. Réparer un souvenir. Raviver un regard. Retrouver la trace d’un passé heureux.
Les personnages rencontrés au fil de l’aventure ne sont pas là pour briller. Ce sont des habitants ordinaires, chacun portant une parcelle du souvenir de votre grand-père : un vieil ami, une ancienne rivale, une figure oubliée. Aucun n’est développé avec profondeur dramatique, mais tous participent à tisser une mémoire collective, douce, parfois mélancolique.
Le récit se construit par accumulation : une photo prise d’un certain angle, une anecdote racontée par un ancien pêcheur, une zone de l’île redécouverte après des années. Le journal du grand-père s’étoffe peu à peu, mais ne se complète jamais entièrement. Et c’est là la subtilité du propos : on ne reconstruit pas un passé tel qu’il fut. On en capte des échos. On en dessine l’intention.
Aucune ligne de dialogue ne cherche à bouleverser. Aucune scène ne force l’émotion. Le jeu reste pudique, modeste, presque silencieux dans sa façon de raconter. Mais cette discrétion cache une réelle justesse : Petit Island ne cherche pas à vous faire pleurer. Il cherche à vous faire vous souvenir.
Photographier pour se souvenir, marcher pour comprendre
Le gameplay de Petit Island repose sur une idée simple : explorer une île à taille humaine, appareil photo en main, et capturer des images précises pour reconstituer les souvenirs d’un grand-père oublié. Pas d’ennemis, pas de timers, pas de pression. Seulement l’espace, la mémoire, et le regard.
Chaque objectif prend la forme d’une photographie à retrouver : une vieille barque, un sommet rocheux, une scène de marché figée dans le passé. Le journal de votre grand-père vous donne un indice — parfois une phrase, parfois une image floue — et c’est à vous de parcourir l’île pour retrouver le bon lieu, le bon cadrage, le bon moment. Ce n’est pas une chasse au trésor. C’est une archéologie affective.
L’exploration se fait en toute liberté. L’île est découpée en zones naturelles — forêt, plage, village, colline — que vous découvrez sans contrainte de progression. Mais malgré la variété apparente, le level design reste simple, presque trop sage. Aucun vrai détour, aucun raccourci caché, aucun secret inattendu. L’espace est agréable à arpenter, mais manque de surprise structurelle.
Le système de photo fonctionne correctement, mais manque de précision technique : le jeu accepte des angles très approximatifs, ce qui peut tuer une partie du plaisir de reconstitution. À l’inverse, certaines photos demandent un positionnement trop rigide, générant de la frustration. Une balance imparfaite, qui affaiblit la mécanique centrale.
Quelques quêtes secondaires viennent enrichir le parcours : photographier certains animaux, aider un habitant à retrouver un objet perdu, reconstituer un vieux festival. Rien de révolutionnaire, mais ces micro-récits renforcent l’attachement à l’île et à ses habitants.
Enfin, notons une originalité discrète mais efficace : plus vous avancez dans la collecte des souvenirs, plus la végétation, les sons et les couleurs de l’île évoluent subtilement. Comme si la mémoire du grand-père réanimait peu à peu l’environnement lui-même.
Un gameplay modeste, sans profondeur mécanique, mais porté par une cohérence d’intention : prendre son temps, chercher sans pression, et transformer chaque cliché en offrande silencieuse.
Couleurs douces, musiques effacées
Petit Island ne cherche pas à impressionner par sa technique, mais à apaiser par son ambiance. La direction artistique privilégie la douceur, la lisibilité, la bienveillance. Le style visuel, inspiré de l’esthétique “low-poly pastel”, évoque des livres pour enfants illustrés : contours simples, formes rondes, textures douces.
Chaque zone de l’île possède une identité visuelle claire : le marché aux parasols colorés, la falaise balayée par le vent, les forêts aux feuillages rose tendre. Rien de réaliste. Tout est évocation. C’est une île de souvenirs, pas une carte postale. Et dans ce flou volontaire, le jeu trouve une forme de chaleur sincère.
Les animations sont minimalistes mais suffisantes : Lily se déplace avec fluidité, ses interactions sont basiques mais toujours claires. Aucun effet spectaculaire, aucune mise en scène grandiose. Seulement des gestes simples, précis, et une cohérence visuelle constante.
Mais c’est surtout dans l’usage de la lumière que le jeu impose sa patte : des lueurs douces à l’aube, des ombres longues au crépuscule, des reflets tremblants sur les plans d’eau. Ces transitions renforcent le caractère contemplatif de l’expérience, sans jamais distraire.
Côté sonore, Petit Island opte pour une bande originale discrète, presque effacée. Quelques nappes de guitare acoustique, des notes de piano, parfois un violon solitaire. Chaque thème accompagne l’exploration sans jamais prendre le dessus. La musique ici n’est pas un commentaire émotionnel. C’est une respiration.
Les bruitages sont eux aussi d’une grande finesse : bruissements de feuillage, pas dans le sable, chuchotement du vent dans les branches. Rien n’est exagéré. Et surtout, aucun son n’est inutile. L’environnement sonore agit comme un fil invisible entre Lily et les souvenirs qu’elle traque.
Sur Nintendo Switch, aucun ralentissement noté. Le jeu tourne à 30fps constants, avec des temps de chargement quasi inexistants. Les textures sont parfois un peu floues en mode portable, mais cela ne nuit jamais à la lisibilité. C’est une proposition techniquement modeste, mais parfaitement adaptée à son support.
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