Développé par Ancient Forge Studio, Glorious Companions est un jeu de rôle tactique au tour par tour qui vous plonge dans le monde sombre et fantastique de Navaroth. Sorti le 19 décembre 2024 sur PC, le jeu propose aux joueurs de forger leur propre destinée en tant que leader d’une compagnie de mercenaires. Mais cette promesse ambitieuse est-elle tenue ?
Les mercenaires de l’oubli
Dans le chaos perpétuel des terres de Navaroth, il n’y a pas de prophéties destinées à guider un héros, ni de divinités bienveillantes pour dicter la marche du monde. Ici, seuls les plus forts survivent, et Glorious Companions embrasse cette brutalité sans chercher à adoucir son propos. Le joueur n’incarne pas un élu, un sauveur ou un noble en quête de justice. Il est un chef de guerre sans patrie, un mercenaire façonné par la nécessité plutôt que par la gloire.
Dès le début du jeu, le joueur est amené à choisir sa faction, une décision qui influence profondément l’histoire et les relations avec le monde. Chaque nation de Navaroth navigue entre conflits et ambitions, cherchant à imposer sa vision d’un ordre fragile sur un continent où les alliances sont aussi temporaires que les vies des guerriers jetés sur le champ de bataille. Les Valrenay, inspirés des sociétés féodales européennes, s’accrochent à un code de chevalerie qui n’a plus de sens dans un monde où la loyauté se vend au plus offrant. Les nordiques du Dravend, quant à eux, incarnent la rudesse des conquérants tribaux, où seul le sang versé forge les héritages.
Mais si ces factions structurent le cadre du jeu, ce sont les compagnons qui donnent à l’aventure sa véritable épaisseur. Contrairement à de nombreux RPG tactiques où les unités sont interchangeables, Glorious Companions pousse à tisser des liens avec son groupe, à comprendre leurs forces, leurs faiblesses, et surtout, leurs aspirations. Chaque mercenaire a une histoire, souvent faite de regrets, de trahisons et de rêves brisés, et leurs interactions ne sont pas de simples échanges statiques : leurs relations évoluent en fonction des décisions prises par le joueur.
Les dialogues renforcent cette sensation d’être au cœur d’un monde pragmatique, où les idéaux sont un luxe que peu peuvent se permettre. Si certains compagnons acceptent d’être des outils entre vos mains, d’autres remettront en question vos ordres, vos choix, votre légitimité à les mener. La loyauté n’est jamais acquise, et perdre un membre d’élite n’est pas seulement une perte tactique, c’est aussi un choc narratif qui modifie l’équilibre de la compagnie.
Là où un RPG classique mise sur une grande fresque épique, Glorious Companions propose une narration fragmentée, où chaque joueur trace son propre récit, forgé par ses victoires et ses défaites. Ce n’est pas une histoire linéaire, mais une succession d’événements qui façonnent l’identité du groupe, où l’honneur, la trahison et la survie s’entremêlent sans jamais donner de réponses faciles.
Dans ce monde où aucune nation n’est véritablement juste, où aucune guerre ne se termine sans cicatrices, Glorious Companions ne propose pas de héros. Il ne propose que des hommes et des femmes en quête d’une cause… ou d’un prix.
La stratégie forgée dans le sang et la cendre
Glorious Companions n’est pas un RPG tactique où l’on peut se permettre d’envoyer ses troupes à la mort sans réfléchir. Ici, chaque bataille est un jeu d’échecs cruel, où une erreur de placement peut condamner un vétéran durement entraîné et faire basculer des semaines de progression dans le néant. Plus qu’un simple jeu de stratégie au tour par tour, il s’agit d’un test permanent de survie et d’adaptation, un univers où les vainqueurs ne sont pas toujours les plus forts, mais ceux qui savent plier sans rompre.
Le système de combat est conçu pour être aussi punitif que gratifiant. Chaque affrontement repose sur la gestion minutieuse des positions, des compétences et des ressources. Il ne suffit pas de foncer l’épée en avant : un soldat mal équipé ou épuisé est une cible facile, et l’ennemi ne fait pas de quartier. L’importance de la formation et du terrain est cruciale : attaquer en hauteur offre un avantage significatif, tandis que se retrouver encerclé est une condamnation à mort quasi certaine.
Ce réalisme s’étend au niveau de la fatigue et des blessures. Contrairement à d’autres jeux où un simple repos suffit à restaurer une unité, ici les séquelles des combats sont durables. Un compagnon blessé combattra moins efficacement, un vétéran enchaînant les batailles finira par s’épuiser, et chaque victoire laisse des marques visibles sur votre groupe. Ce système pousse à réfléchir à chaque engagement : parfois, éviter un combat ou négocier un accord est une meilleure option que de risquer des pertes irremplaçables.
La progression des unités suit cette même logique d’évolution organique. Chaque soldat s’améliore non pas en accumulant des points d’expérience bêtement distribués, mais en fonction de ses actions sur le terrain. Un lancier qui passe son temps en première ligne deviendra naturellement plus résistant, un archer ayant survécu à plusieurs escarmouches développera une précision meurtrière, et un chef de guerre inspiré par ses victoires verra son charisme influencer le moral des troupes. Cette absence d’arbre de compétences figé permet de façonner une compagnie unique, adaptée au style du joueur et aux défis rencontrés.
L’économie et la gestion de la compagnie sont tout aussi impitoyables. Contrairement à d’autres jeux où l’on amasse des richesses sans contrainte, ici, chaque pièce d’or a son importance. Recruter un mercenaire coûte cher, et le garder en vie coûte encore plus cher. L’équipement s’use, la nourriture doit être renouvelée, et la fidélité de vos hommes dépend de leur paie. Ignorer ces aspects mène rapidement à la mutinerie ou à l’échec pur et simple, forçant le joueur à équilibrer chaque dépense et chaque engagement avec une prudence stratégique.
L’exploration de Navaroth, loin d’être une simple carte statique, se révèle vivante et imprévisible. Chaque région est truffée d’opportunités et de dangers, et les décisions prises en déplacement peuvent avoir des répercussions profondes. Un raid sur un village peut vous apporter des ressources, mais attirer la colère d’une faction puissante. Une alliance avec une guilde marchande peut garantir des profits stables, mais vous rendre vulnérable aux attaques de brigands. Ce ne sont pas de simples quêtes secondaires, mais des choix stratégiques qui façonnent votre ascension ou votre chute.
Glorious Companions n’est pas un jeu qui vous prend par la main. Il vous force à penser comme un véritable chef de guerre, à prendre en compte chaque détail, à anticiper chaque mouvement, à accepter que parfois, une bataille perdue vaut mieux qu’une guerre impossible à soutenir. Il récompense l’intelligence, la prudence, et la capacité à s’adapter bien plus que la force brute. C’est un jeu où la gloire ne vient jamais sans sacrifices, et où chaque victoire a un prix.
Des champs de bataille vivants et des mélodies de guerre
Dans un jeu où chaque combat est un affrontement de volontés et de stratégies, l’ambiance visuelle et sonore joue un rôle fondamental dans l’immersion et l’impact émotionnel. Glorious Companions ne cherche pas à impressionner par une explosion d’effets visuels ou une direction artistique tape-à-l’œil. Son objectif est tout autre : vous plonger dans la rudesse d’un Moyen Âge brutal, où la saleté recouvre l’acier autant que le sang, où chaque carte n’est pas un décor, mais un champ de bataille où se joue la survie de votre compagnie.
Graphiquement, le jeu adopte un style semi-réaliste, qui privilégie la clarté stratégique au détriment du pur spectacle visuel. Les terrains sont variés, mais jamais artificiels : des collines escarpées qui donnent un avantage aux archers, des marais boueux où l’infanterie lourde peine à se déplacer, des villages en ruine où l’on peut exploiter les décombres pour tendre des embuscades. Les batailles ont un poids visuel tangible, non pas par des effets spectaculaires, mais par la manière dont chaque unité, chaque pièce d’équipement, chaque corps tombé sur le champ de bataille raconte une histoire.
Les animations des combats, bien que parfois un peu rigides, transmettent une brutalité authentique. Pas de combats chorégraphiés dignes du cinéma, mais des échanges de coups lourds, de parades désespérées, de blessures qui ne pardonnent pas. Un duel entre deux vétérans ne ressemble pas à un ballet, mais à un affrontement épuisant, où chaque erreur peut être fatale.
L’ambiance sonore renforce cette impression de batailles sales et viscérales. Les cris des guerriers, le choc du métal contre le métal, le bruit sourd d’un corps qui s’effondre sur le sol… tout contribue à rendre chaque affrontement viscéral et pesant. Il ne s’agit pas de combats exagérément spectaculaires, mais de luttes acharnées où l’effort et la fatigue transparaissent dans chaque échange.
La bande-son, quant à elle, ne cherche pas à être omniprésente. Glorious Companions adopte une approche plus minimaliste, où les moments de calme sont aussi importants que les envolées orchestrales. Les musiques accompagnent l’action sans l’envahir, créant une atmosphère pesante entre deux affrontements, une tension sourde qui rappelle que la guerre n’est jamais loin. Les instruments à cordes et les percussions dominent, évoquant des chants de guerre oubliés, des rituels d’avant-bataille où l’on se prépare à l’inévitable.
L’une des grandes forces du sound design réside dans l’immersion des villes et des campements. Les marchés bourdonnent d’activité, les tentes des mercenaires résonnent de conversations furtives, les places de village portent l’écho des rumeurs et des nouvelles venues de terres lointaines. Tout cela donne du poids au monde, le rendant vivant même en dehors des combats.
Enfin, les voix, bien que limitées, sont utilisées avec parcimonie pour renforcer l’identité des compagnons. Les ordres aboyés sur le champ de bataille, les grognements d’effort, les exclamations d’un mercenaire gravement blessé ajoutent une dimension supplémentaire à la tension du jeu. Pas besoin de longues cinématiques doublées : quelques mots murmurés avant un affrontement suffisent parfois à raconter plus qu’un dialogue entier.
Glorious Companions n’est pas un jeu qui cherche à impressionner par sa technique brute, mais par l’ambiance qu’il construit, par la manière dont il fait ressentir le poids du monde et des choix que l’on y fait. C’est un monde dur, austère, où chaque son, chaque image rappelle que la gloire n’est qu’un instant fugace, souvent payé au prix du sang.
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