Après avoir brillamment redonné vie aux grenouilles bagarreuses de Battletoads, le studio britannique Dlala revient sous les projecteurs avec une toute nouvelle aventure signée Disney : Illusion Island, paru sur Nintendo Switch le 28 juillet 2023. Annoncé lors de l’évènement D23 en septembre 2022 comme une expérience multijoueur accessible à toute la famille, le titre s’affirme pourtant davantage comme un héritier subtil du genre Metroidvania, mêlant exploration et plateformes sous le regard complice de Mickey et ses inséparables camarades.
Mais derrière cette promesse ludique et familiale, que réserve réellement cette escapade en compagnie des héros emblématiques de Disney ? Ce voyage dans un univers coloré et enfantin cache-t-il sous ses traits délicats une véritable profondeur de jeu capable de ravir autant les petits aventuriers que les explorateurs aguerris ?
Quand une souris se fait rouler dans la farine
Dans Disney Illusion Island, vous incarnez Mickey, Minnie, Donald et Dingo, invités à un pique-nique en apparence innocent sur une île énigmatique. Mais ce banquet paisible n’est qu’une façade orchestrée par Toku, le mystérieux leader du peuple Hokuns. Dupés par cette créature à l’allure attachante, vous découvrez rapidement que votre présence répond à un dessein bien moins anodin : retrouver trois précieux ouvrages disparus, les tomes sacrés de la Connaissance, dérobés par d’infâmes voleurs. Pour les Hokuns, il est évident que nul héros ne pourrait être plus valeureux que Mickey et ses amis pour mener à bien cette quête improbable.
L’écriture constitue assurément l’une des grandes réussites de l’aventure. Ponctué d’un humour fin et habilement mené, le scénario se distingue par sa subtilité à double sens : les enfants y trouveront leur compte à travers des échanges cocasses et légers, tandis que les adultes saisiront aisément des allusions délicieusement décalées. Dès l’introduction, Mickey et ses camarades confessent ainsi avec malice que leurs précédentes escapades étaient, après tout, des aventures fictives destinées à divertir les spectateurs. Désormais, confrontés à une quête authentique, les protagonistes affichent une autodérision réjouissante et rafraîchissante.
Le comique reste omniprésent tout au long du récit, sans jamais basculer vers la facilité ou la caricature vulgaire. Les dialogues fusent, intelligents et bien dosés, renforcés par une excellente interprétation vocale entièrement doublée en français par les voix officielles des personnages Disney. Mention spéciale à Donald, éternel grognon, systématiquement affublé d’objets improbables ou dangereux qui reflètent parfaitement son tempérament explosif. Ce choix narratif apporte une légèreté bienvenue, illustrant avec justesse la maîtrise de la dérision dont fait preuve le studio Dlala.
Malgré une trame principale assez classique, le titre parvient à maintenir l’intérêt grâce à une écriture généreuse et à une galerie de personnages secondaires attachants, même si relativement peu développés. Disney Illusion Island demeure avant tout une fable charmante et drôle, capable de captiver petits et grands par son approche bienveillante et respectueuse envers les personnages emblématiques du géant américain. Cette délicatesse narrative, associée à la finesse de ses dialogues, confère au jeu une aura particulièrement attachante, faisant oublier une durée de vie relativement courte et une histoire sans grande surprise.
Petits sauts pour la souris, grands pas pour le genre
Disney Illusion Island surprend dès les premières minutes par sa volonté de détourner les codes du jeu de plateformes classique pour proposer une relecture douce et malicieuse du Metroidvania. Si le terme évoque souvent des labyrinthes impitoyables peuplés de monstres hostiles, ici tout est pensé pour les jeunes joueurs : pas de combats, pas d’ennemis à abattre, mais une aventure d’évitement, de découvertes et de progression tranquille où l’agilité et l’observation prennent le pas sur la confrontation.
Vous arpentez une île foisonnante, divisée en multiples biomes reliés par un level design ouvert et intuitif. Chaque nouveau pouvoir – tel que le double saut ou l’escalade murale – devient la clé vers de nouvelles zones, et chacun des quatre héros profite d’une variation visuelle de ces compétences : une fusée pour Mickey, un avion en papier pour Minnie, un piment magique pour Dingo et un missile capricieux pour Donald, fidèle à son tempérament volcanique. Ce soin accordé à la différenciation des animations confère à chaque personnage une identité ludique unique, renforçant l’envie de rejouer l’aventure sous un autre angle.
La progression, savamment dosée, s’adresse aux enfants dès 6 ans tout en conservant une structure gratifiante. Les points de sauvegarde pullulent et jalonnent l’aventure à intervalles très réguliers, permettant des sessions brèves parfaitement adaptées à un jeu familial. Le système de difficulté ajustable en cours de partie – allant d’un cœur unique à l’invincibilité complète – renforce encore cette accessibilité, sans pour autant brider les possibilités d’exploration pour les plus aguerris.
Côté exploration, l’expérience s’enrichit de nombreux objets à collectionner, souvent bien dissimulés derrière des sections de plateforme plus exigeantes. Entre les Réminiscences de Mickey retraçant ses grandes aventures, les cartes “Cados” approfondissant le lore, ou encore les particules lumineuses appelées Glimts, tout est pensé pour stimuler la curiosité sans surcharger le joueur d’objectifs inutiles. Ces éléments secondaires ne bloquent jamais la progression, mais encouragent les plus curieux à affiner leur maîtrise des mécaniques.
Le multijoueur local jusqu’à quatre joueurs fait partie intégrante de l’expérience. Les interactions coopératives, bien que limitées à des mécaniques simples d’entraide, fonctionnent parfaitement dans un cadre familial. Seul petit accroc : il est impossible de rejoindre une partie en cours ou de changer de personnage sans passer par le menu principal. Une contrainte qui casse légèrement le rythme de l’aventure, mais qui reste largement atténuée par les temps de chargement très courts.
Pensé avant tout pour initier les plus jeunes aux joies de l’exploration, Disney Illusion Island réussit à créer un Metroidvania de première découverte, dénué de violence, d’une grande douceur de prise en main, et enrichi de mécaniques accessibles mais jamais dénuées d’intérêt.
Des crayons enchantés au service du mouvement perpétuel
D’un simple coup d’œil, Disney Illusion Island impose une direction artistique affirmée, entièrement dessinée à la main. Les environnements débordent de couleurs vives, de contrastes nets et de détails malicieux, créant un monde aussi accueillant qu’expressif. Chaque biome — qu’il s’agisse de jungles luxuriantes, de cavernes brumeuses ou de structures mécaniques brinquebalantes — se distingue par une identité visuelle claire et cohérente, soutenue par une lisibilité exemplaire des parcours.
Le charme de l’animation constitue une signature indiscutable du projet. Les personnages principaux — Mickey, Minnie, Donald et Dingo — bougent avec une exubérance volontairement exacerbée, reprenant les codes de la nouvelle génération de cartoons Disney. Les mouvements sont amples, élastiques, bondissants. Chaque geste, chaque mimique est conçu pour raconter une émotion, générer un rire ou renforcer la dynamique de groupe. Les ennemis, bien que pacifiques, bénéficient eux aussi d’un soin d’animation remarquable, participant à cette ambiance de dessin animé perpétuel, où rien ne tient en place et tout semble animé par un ressort invisible.
Le style graphique des héros, en revanche, bouscule les habitudes. Oubliés les traits ronds et classiques des origines : les figures iconiques arborent ici un style plus épuré, anguleux, dans la veine des séries récentes comme Mickey Mouse Shorts. Ce choix assumé offre une lecture visuelle immédiate, mais peut déconcerter ceux attachés à une représentation plus traditionnelle des mascottes Disney. Ce minimalisme graphique, très en vogue, tend vers une esthétique contemporaine davantage conçue pour séduire les plus jeunes que pour flatter la nostalgie.
Sur le plan technique, la Nintendo Switch tient parfaitement la cadence. Aucun ralentissement ne vient troubler l’expérience, même à quatre joueurs simultanés. Les transitions sont fluides, les effets visuels discrets mais efficaces, et la lisibilité reste constante, même dans les zones plus chargées.
La bande-son, quant à elle, s’inscrit dans un registre léger et agréable, accompagnant les moments d’exploration ou les rencontres scénarisées avec délicatesse. Sans chercher à imposer des thèmes mémorables, elle soutient l’ambiance colorée avec justesse. Les bruitages, eux, renforcent l’aspect cartoon par une panoplie de sons expressifs : couinements, rebonds, sifflements, tous empruntés à l’univers sonore de l’animation traditionnelle.
Enfin, le doublage intégral en français, assuré par les voix officielles de Mickey et ses amis, apporte une authenticité immédiate à l’ensemble. L’humour trouve ainsi une résonance naturelle, chaque ligne de dialogue étant livrée avec un timing comique précis, en parfaite adéquation avec les animations à l’écran.
Disney Illusion Island construit ainsi une identité audiovisuelle cohérente, dynamique, sans jamais verser dans la surcharge. Un monde de dessin animé vivant, mobile, pensé pour capter l’attention sans la saturer.
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