Vous incarnez Adrian, un jeune homme plongé dans un cauchemar aztèque : sa mère a disparu dans un rituel ancien, et il se retrouve piégé dans une demeure vivante où les dieux exigent un sacrifice. Death Relives se présente comme un jeu de survie-horreur à la première personne, mêlant furtivité, énigmes de type escape-room et une mythologie rare à l’écran : Xipe Tótec et ses symboles rongent chaque couloir. Un concept rare, lourd de promesse, mais fragilisé aussitôt par sa mise en œuvre.
Mais cet univers étrangement prometteur trouve-t-il un souffle ? Ou reste-t-il enseveli sous des mécaniques informes, une IA pathétique, et un récit sans chair ? L’expérience tient-elle la tension, ou dilapide-t-elle vos minutes sous le signe du rituel brisé ?
Mythologie creusée dans une fiction claustrophobe
Death Relives ne se contente pas d’invoquer l’horreur : il la tisse à même une mythologie trop rarement explorée. Xipe Tótec, dieu aztèque de la fertilité et de la mort, n’est pas ici une figure lointaine, mais un bourreau omniprésent, qui imprègne chaque mur, chaque énigme, chaque sacrifice. Le récit vous place dans la peau d’Adrian, un jeune homme à la recherche de sa mère, disparue dans une maison où les rites anciens ont survécu au monde moderne. Mais cette maison n’est pas un lieu : c’est un piège.
La structure narrative s’apparente à celle d’une pièce unique aux chambres multiples — une succession d’espaces verrouillés où chaque avancée dévoile un fragment de passé. Des notes disséminées, des visions, des hallucinations… Le jeu ne raconte pas frontalement. Il évoque. Il suggère. Il construit l’angoisse à partir de silences, de textes griffonnés, d’échos rituels.
Adrian lui-même n’est pas un personnage complexe : il agit, il réagit, il survit. Son histoire personnelle, en dehors du traumatisme familial initial, reste peu développée. Il n’a ni arc intérieur, ni transformation profonde. Il est un support de peur, un vecteur d’inquiétude. Son seul lien émotionnel — la recherche de sa mère — est exposé mais jamais approfondi. Aucun souvenir, aucun flashback, aucun dialogue réel ne vient nourrir cette relation. L’émotion reste suspendue.
Les entités qui peuplent la maison — prêtres défigurés, statues vivantes, fantômes sacrificiels — ne parlent pas. Mais elles habitent. Elles rôdent. Et dans ce silence forcé naît une forme de pression narrative. On ne comprend pas tout. On ne saura jamais tout. Le jeu ne cherche pas à expliquer Xipe Tótec. Il l’impose. Comme un spectre mythologique qui rôde hors champ.
Death Relives parvient ainsi à tisser une ambiance narrative, sans en faire un récit fort. Ce n’est pas une histoire qu’on suit. C’est une menace qu’on subit. Une mythologie qui nous traverse, mais ne nous regarde jamais vraiment.
Mécaniques rouillées sous masque divin
Death Relives se présente comme un jeu de survie horrifique à la première personne, articulé autour de trois axes : exploration, furtivité et résolution d’énigmes. Mais dès les premiers pas dans la maison, le fragile édifice mécanique se fissure. Le joueur se déplace lentement, avec une inertie désagréable, dans un environnement sombre où la lisibilité est souvent sacrifiée à l’ambiance. Chaque salle devient un obstacle, non par sa complexité, mais par le flou de ses intentions.
Le cœur du gameplay repose sur la fuite. Le dieu Xipe Tótec ou ses avatars rôdent, apparaissant de manière semi-scriptée, vous traquant selon des règles floues. La mécanique de cachette — se dissimuler dans des armoires, retenir son souffle — est fonctionnelle mais archaïque. Aucune évolution, aucun outil de contre, aucune gestion dynamique de la menace : si l’ennemi vous voit, vous mourrez. Recommencez. Encore. Encore.
Les énigmes, quant à elles, suivent une logique d’escape room : aligner des symboles, retrouver un code, placer des objets rituels dans le bon ordre. Mais aucune ne brille par son invention. Tout est déjà vu. Certaines souffrent d’un manque de feedback visuel, d’autres d’un système d’interaction rigide ou imprécis. Le jeu peine à équilibrer sa courbe : certains puzzles sont évidents, d’autres absurdes, sans cohérence de difficulté ni de rythme.
Le level design, cloisonné, tente de construire une maison-miroir, où les pièces se répondent, s’enchevêtrent, se ferment derrière vous. Mais cette structure se heurte à des problèmes de lisibilité, de balisage, de progression bloquée. Il est facile de tourner en rond, de manquer un objet clé, de confondre un bug avec une énigme non résolue. L’espace, censé être oppressant, devient parfois simplement frustrant.
Quelques mécaniques secondaires existent — gestion de la lumière, respiration limitée, objets de défense rituels — mais elles restent anecdotiques. Le jeu refuse tout système évolutif : pas de compétences, pas de ressources à gérer, pas de montée en tension mécanique. Chaque nouvelle zone reprend les mêmes principes que la précédente. Le frisson se dilue dans l’habitude.
Death Relives échoue à transformer son concept en jeu. La mythologie est présente. La tension est esquissée. Mais les mécaniques, elles, restent archaïques, désincarnées, souvent contre-productives.
Gravure mythologique sur moteur souffrant
Visuellement, Death Relives mise tout sur l’atmosphère. Les décors intérieurs — couloirs sinueux, chambres rituelles, caves sacrificielles — baignent dans une lumière rougeâtre, grésillante, où chaque mètre carré semble suinter d’encens et de sang coagulé. L’architecture de la maison mêle éléments coloniaux et motifs précolombiens, dans un assemblage souvent déroutant mais cohérent dans sa volonté d’oppression. L’obsession du détail occulte parfois la lisibilité : certains objets essentiels se confondent avec le décor, et la pénombre devient un obstacle plus qu’un outil.
Le jeu tente de marier la rigueur de l’esthétique aztèque avec les codes visuels de l’horreur contemporaine : crânes empilés, murs gravés, masques déformés, fresques animées. Le résultat est saisissant dans ses meilleurs moments, mais inégal sur le plan technique. Textures floues, éléments mal alignés, transitions d’éclairage brutales — le moteur peine à maintenir une cohérence de rendu, surtout sur Xbox Series X. Les reflets sont peu réalistes, les ombres parfois incohérentes, et les effets spéciaux — brume, distorsions, sang — manquent de finition.
L’animation trahit encore davantage les limites de production. Les créatures, bien que glaçantes dans leur design, se déplacent de manière rigide. Leurs trajectoires sont prévisibles, leurs postures figées. Adrian lui-même souffre de mouvements basiques : pas de feedback corporel, pas de gestuelle immersive, aucune mise en scène de son propre effroi. On regarde un pantin avancer dans un théâtre de mort, sans jamais y croire tout à fait.
La bande-son, en revanche, porte le jeu à bout de souffle. Percussions tribales, chœurs dissonants, nappes étouffantes, ruptures brutales : chaque pièce musicale accompagne la descente dans l’horreur avec une cohérence rare. Les silences sont lourds, pesants, jamais creux. Certaines pièces déclenchent des motifs musicaux dynamiques, avec des montées rythmiques liées à la présence de l’ennemi. Le jeu n’est jamais silencieux — mais il n’est jamais bruyant non plus.
Les effets sonores accentuent cette réussite. Le craquement d’un os, le froissement d’un tissu rituel, le grésillement d’une torche, le souffle d’un masque… Tout sonne juste. Les rares voix — cris, incantations, prières — sont déformées, mixées dans la texture même du décor. La maison parle sans parler.
Si l’image fatigue, le son tient. Il construit ce que les textures abandonnent. Il structure ce que les modèles n’animent pas.
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