Bienvenue à Night City. Une mégalopole suffocante, où les néons se reflètent sur l’acier froid des implants cybernétiques, où les corpos dictent la loi et où les mercenaires comme vous vendent leur âme au plus offrant. Un terrain de jeu immense, une jungle urbaine où chaque ruelle abrite une opportunité… ou un piège mortel.
Cyberpunk 2077 promettait une immersion totale dans cet enfer futuriste, une liberté sans précédent et un monde vivant où chaque décision aurait un poids. Après des années d’attente, après un développement titanesque et une communication millimétrée, le jeu de CD Projekt Red est enfin là.
Mais après tant de promesses, après tant d’attentes et d’espoirs, Cyberpunk 2077 parvient-il vraiment à tenir son pari ? Night City est-elle l’expérience ultime du RPG en monde ouvert, ou simplement une autre dystopie rongée par ses propres ambitions ?
Une quête d’identité dans un monde qui ne vous appartient pas
Cyberpunk 2077 n’est pas l’histoire d’un héros. C’est celle d’un survivant. Un mercenaire parmi tant d’autres, qui tente de se frayer un chemin à travers les bas-fonds et les gratte-ciels de Night City, un pion sur l’échiquier des corpos, un grain de sable dans la machine bien huilée du capitalisme technologique. V, c’est vous. Un homme ou une femme dont le passé est défini par trois origines possibles : Nomade, Gosse des rues ou Corpo. Un choix qui n’a pas seulement un impact sur les premières heures de jeu, mais qui façonne la manière dont Night City vous perçoit, dont les gangs vous parlent, dont les corpos vous considèrent.Si vous venez des Badlands, vous êtes un étranger dans cette ville de métal et de mensonges. Si vous avez grandi dans la rue, vous connaissez ses règles, ses codes, mais aussi ses pièges. Si vous venez d’Arasaka, alors vous étiez l’un d’eux, avant d’être broyé et recraché comme un déchet.
Mais quel que soit votre passé, tout bascule. Une mission qui tourne mal, un job de mercenaire qui aurait dû être comme les autres, et soudain, un artefact implanté dans votre tête, un virus sous la forme d’une conscience étrangère qui vous ronge de l’intérieur. Johnny Silverhand. Terroriste. Icône du rock. Homme mort depuis cinquante ans, mais bien vivant dans votre esprit.
Dès cet instant, Cyberpunk 2077 ne raconte plus une simple ascension dans la hiérarchie criminelle de Night City. C’est une course contre la montre, une lutte pour votre propre existence, une descente dans les méandres d’une ville qui vous a déjà condamné avant même que vous ne le réalisiez. Night City est un cimetière. Un lieu où l’on vit vite et où l’on meurt plus vite encore, où seuls les plus rusés, les plus cruels, ou les plus chanceux survivent assez longtemps pour laisser une empreinte. Les personnages que vous croisez dans votre quête ne sont pas des compagnons d’aventure classiques, mais des âmes errantes, des êtres brisés, chacun portant son fardeau, chacun traînant derrière lui une histoire de trahison, de survie ou de vengeance.
Judy Álvarez est l’une d’elles. Ingénieure en braindance, technicienne de génie et activiste clandestine, elle voit en vous une opportunité d’ébranler les systèmes en place. Mais plus qu’une simple alliée, Judy est l’incarnation du désespoir de Night City, une femme qui cherche un sens dans un monde où tout est à vendre, où chaque émotion peut être enregistrée, revendue, consommée. Panam Palmer, elle, n’a jamais accepté la loi de la ville. Nomade jusqu’au bout des ongles, elle a fui son clan, mais traîne avec elle une colère sourde, une rage contre un système qui ne lui laissera jamais sa place. Ses compétences au volant et son talent pour la guérilla en font une alliée précieuse, mais derrière son tempérament de feu se cache une femme qui refuse d’être seule, qui cherche désespérément un foyer dans un monde qui l’a rejetée.
Goro Takemura est tout l’inverse. Samouraï d’Arasaka, homme de devoir, fidèle jusqu’à la moelle, il incarne l’ancien monde, celui où l’honneur et la hiérarchie comptaient encore. Mais quand son employeur est assassiné sous ses yeux, il devient un homme traqué, un fantôme errant dans une ville où il n’a plus de place, cherchant une vengeance qui n’aura peut-être jamais lieu. Et puis, bien sûr, il y a Johnny Silverhand. Incarné par Keanu Reeves, il n’est pas un simple compagnon d’infortune. Il est dans votre tête, dans votre chair, une présence constante, moqueuse, cynique, provocante. Une voix qui vous pousse à la révolte, qui vous insulte, qui vous teste. Un spectre du passé qui refuse de disparaître et qui vous entraîne dans son combat, qu’il le veuille ou non.
Cyberpunk 2077 ne se contente pas de vous jeter dans Night City avec une quête principale à suivre. Il vous donne des âmes à côtoyer, des destins à croiser, des existences à changer ou à briser. Et chaque interaction, chaque choix, façonne un peu plus votre propre chemin dans cette jungle urbaine où la seule règle qui compte est celle du plus malin. Cyberpunk 2077 n’est pas une histoire linéaire. C’est un labyrinthe de décisions, de trahisons et de choix impossibles. Chaque mission, chaque contrat, chaque dialogue est une opportunité de plonger plus profondément dans les strates de Night City.
La quête principale, centrée sur la lutte de V contre l’implant qui le condamne, est une course effrénée, une descente progressive vers l’inévitable. Mais autour d’elle gravitent des récits secondaires d’une richesse rare. Des enquêtes de détective dans les bas-fonds du district de Watson. Des guerres de gangs où la frontière entre ami et ennemi devient floue. Des affaires de corruption corporatiste où la vérité n’est jamais qu’une autre monnaie d’échange. Et au bout du chemin, des fins multiples. Aucune n’est véritablement une victoire. Juste des conséquences. Night City ne laisse personne s’en sortir indemne, et encore moins vivant. Cyberpunk 2077 ne raconte pas une épopée héroïque. C’est une plongée dans un monde qui ne vous appartient pas, une tentative désespérée de survivre dans un système qui vous écrasera quoi qu’il arrive.
Un monde à portée de main, mais jamais totalement sous contrôle
Night City est une bête indomptable, un organisme de verre, d’acier et de bitume qui avale ceux qui tentent de la dominer. Mais cette fois, c’est vous qui avez les commandes. Un mercenaire armé jusqu’aux dents, un hacker qui fait trembler les réseaux, un assassin qui efface ses cibles sans laisser de traces. Cyberpunk 2077 veut vous donner les clés de cette ville infernale et vous laisser choisir votre propre chemin.
Promesse tenue ? Pas totalement.
Dans l’ombre d’une ruelle sordide, au sommet d’un gratte-ciel ou au beau milieu d’un club survolté, les affrontements de Cyberpunk 2077 sont brutaux, nerveux, spectaculaires. Chaque arme claque avec une puissance indiscutable, chaque mod cybernétique transforme un peu plus V en machine de guerre. Piratage, assauts à la mitraillette, esquives et combats au corps-à-corps… la ville devient votre terrain de jeu, et chaque fusillade une danse mortelle. Mais cette euphorie est vite tempérée par une IA dépassée. Les ennemis peinent à réagir intelligemment, se jettent parfois tête baissée sous vos balles ou restent bloqués dans les décors. Les flics apparaissent par magie derrière vous dès que vous commettez un crime, sans réel système de poursuite. L’illusion d’un monde qui vit et réagit à vos actions s’effrite à mesure que l’on pousse le système dans ses retranchements.
Night City est tentaculaire, verticale, une mégalopole où chaque quartier a son identité propre, ses règles, ses habitants, ses histoires. Les néons de Japantown contrastent avec les ruelles poisseuses de Watson, les bidonvilles de Pacifica semblent à des années-lumière du luxe de North Oak.La ville regorge de ruelles à explorer, de toits à escalader, de bars où l’on peut croiser des fixers à la recherche de mercenaires désespérés. Mais cette liberté n’est pas totale.
Si la carte regorge de points d’intérêt, certains bâtiments restent inaccessibles, certains intérieurs vides. Les interactions avec les PNJ sont souvent limitées au strict minimum, réduisant le sentiment d’une ville réellement vivante. Les missions sont nombreuses, bien écrites, mais l’exploration pure manque de récompenses, laissant un goût de semi-ouverture plus que de véritable monde à vivre. Cyberpunk 2077 veut être un RPG, et sur ce point, il coche toutes les cases. Des arbres de compétences vastes, des mods cybernétiques qui transforment progressivement V en machine de guerre, une multitude de façons d’aborder chaque mission.
Mais tout cela manque parfois de profondeur. Si les premières heures donnent l’impression d’une évolution infinie, on se rend vite compte que les choix de builds finissent par tourner en rond. Certaines compétences ont un impact réel, d’autres semblent purement cosmétiques. Le piratage, pourtant mis en avant comme une alternative stratégique, devient vite répétitif. Et les mécaniques de loot et de crafting s’enfoncent dans un système où l’on passe plus de temps à fouiller des cadavres pour des armes inutiles qu’à vraiment peaufiner son équipement.
Dans Cyberpunk 2077, chaque mission peut être abordée de multiples façons. On peut s’infiltrer, pirater des caméras, neutraliser ses cibles sans un bruit. On peut négocier, convaincre, détourner l’attention pour éviter un bain de sang. Ou bien on peut entrer, arme au poing, et réduire tout ce qui bouge en charpie. Mais en dehors des quêtes principales et des arcs narratifs majeurs, l’impact de ces décisions reste limité. Les gangs ne semblent pas vraiment retenir vos actions. Vos choix, aussi radicaux soient-ils, n’ont parfois que peu de conséquences sur la ville et son fonctionnement. Le sentiment d’être un acteur central dans cet univers est donc bridé par des scripts trop rigides.
Cyberpunk 2077 avait promis un monde à la fois organique et malléable, une ville où chaque action aurait un impact. Si Night City est visuellement époustouflante, si ses quartiers dégagent une atmosphère saisissante, l’illusion se brise dès qu’on gratte la surface. Les combats sont explosifs mais entachés par une IA limitée. L’exploration est grisante mais parfois artificielle. Le RPG est dense mais manque de répercussions profondes sur le monde. Cyberpunk 2077 n’est pas un mauvais jeu. C’est un jeu qui vacille entre son ambition et ses limites. Un monde à la portée de main… mais jamais totalement sous contrôle.
Une ville qui ne dort jamais
Night City n’est pas une ville. C’est une bête vivante, un monstre de métal et de verre qui vibre sous le poids des néons, des klaxons et des murmures étouffés par le bruit des écrans géants. C’est un décor qui ne se contente pas d’être regardé : il est ressenti, absorbé, vécu à chaque instant. Sur Xbox Series, Cyberpunk 2077 déploie enfin toute sa puissance. Les rues sont saturées de lumières et de reflets, les panneaux publicitaires clignotent à chaque coin de ruelle, et les buildings s’étendent vers le ciel dans une verticalité étourdissante. De jour comme de nuit, la ville dégueule de détails : les rues sales du district de Watson, les bars branchés de Japantown, les buildings oppressants des corpos à City Center, et les bidonvilles délabrés de Pacifica.
Tout ici a été pensé pour immerger, pour happer le joueur dans un univers où le chaos est organisé, où chaque mur, chaque affichage holographique, chaque écran en arrière-plan contribue à la narration visuelle. Chaque quartier a son identité, ses ambiances propres, ses règles tacites, ses dangers à chaque coin de rue.
On ne traverse pas Night City. On s’y perd…
Mais dans Cyberpunk 2077, on se perd surtout dans une ville de bugs. Textures floues, framerate instable, crashs incessants… le jeu peine à tenir debout sur consoles. Le SSD de la console réduit drastiquement les temps de chargement, rendant l’exploration plus fluide; mais loin d’être suffisant pour oublier le reste. Il est évident que le jeu est sorti dans un état non fini, encore en Bêta Test, et nécessite encore d’une grosse année de développement afin d’être peaufiné.
Si Night City vit à travers ses images, elle respire à travers sa musique. Cyberpunk 2077 ne se contente pas de proposer une bande-son, il en fait un élément essentiel de l’expérience. Les radios embarquées diffusent des playlists variées qui reflètent l’identité du monde cyberpunk. Électro-punk saturé, rock industriel aux basses déchirantes, hip-hop futuriste… Chaque station a son propre ton, et chaque morceau contribue à renforcer l’ambiance dystopique du jeu. Que l’on roule sous la pluie dans une nuit sans fin, que l’on traverse un marché clandestin ou que l’on fonce à travers les Badlands à pleine vitesse, la musique accompagne l’instant avec une justesse parfaite. La bande-son originale, signée Marcin Przybyłowicz, P.T. Adamczyk et Paul Leonard-Morgan, oscille entre nappes électroniques hypnotiques et envolées orchestrales glaçantes. Elle intensifie les combats, amplifie les tensions et insuffle une énergie brute aux scènes d’action.
Et puis, il y a Johnny Silverhand. Ou plutôt, son groupe, Samurai. Avec des morceaux nerveux interprétés par le groupe Refused, l’esprit contestataire et destructeur de Silverhand est ancré dans l’ADN du jeu. Ses riffs saturés et ses paroles crachées avec colère résonnent comme une déclaration de guerre contre un monde en décomposition.
Au-delà de la musique, l’environnement sonore de Night City est une prouesse en soi. Les conversations en arrière-plan, les klaxons incessants, les vendeurs de rue qui hurlent leurs promotions, les hologrammes publicitaires qui s’activent en vous détectant… Chaque bruit, chaque son, contribue à donner l’illusion d’une ville qui ne s’arrête jamais. Les armes, elles aussi, ont une identité sonore distincte. Chaque tir, chaque explosion, chaque impact est lourd, brut, viscéral. Les augmentations cybernétiques, lorsqu’elles sont activées, produisent des sons mécaniques précis qui renforcent la sensation de devenir peu à peu une machine.
Et si la VO est d’une qualité indéniable, le doublage français s’en sort avec les honneurs, offrant des interprétations convaincantes et une immersion renforcée pour ceux qui préfèrent jouer dans leur langue. Les quartiers de Night City n’ont jamais été aussi vibrants, aussi oppressants, aussi hypnotiques. Chaque rue, chaque passerelle, chaque pont est une invitation à s’y perdre, à explorer, à écouter. La bande-son enfonce le clou, rythmant chaque instant d’un mélange de rage, de désespoir et de mélancolie brute.
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