Sorti le 8 août 2023 sur Nintendo Switch, Anthology of Fear est le fruit du travail passionné du petit studio polonais RG Crew, édité par Ultimate Games, et curieusement éclipsé par une confusion d’attribution sur Steam. Derrière ce lancement bancal, l’espoir d’une expérience horrifique immersive semblait encore possible.
Mais très vite, ce qui aurait pu être un hommage sincère au genre se transforme en une errance sans âme, où la peur s’efface devant l’ennui, et où le mystère se dilue dans une vacuité désarmante. Dans ce walking simulator déguisé, les frissons sont absents, remplacés par des clichés usés jusqu’à la corde.
Une disparition noyée dans l’ennui
Dans Anthology of Fear, vous incarnez un homme lancé sur les traces de son frère disparu, dans une petite ville désertée, vidée de toute âme et de toute tension véritable. L’ouverture, pleine de promesses, esquisse les contours d’un drame intime, avant de s’effondrer en une succession de clichés creux.
Durant les deux heures que dure l’aventure, aucune menace ne se manifeste, aucune montée d’angoisse ne s’installe. Seule reste une errance mécanique, d’un point A à un point B, à travers des décors vides et sans vie, ponctuée d’énigmes sans enjeu et de jump scares prévisibles comme des balises de mauvais goût.
L’histoire, qui aurait pu s’embraser en fresque psychologique ou en descente aux enfers émotionnelle, se contente de singer de lointains modèles sans jamais les comprendre, s’achevant de manière brutale, sans réponse ni catharsis, laissant le joueur abandonné au seuil d’une intrigue sans fin.
Un chemin sans pièges, un jeu sans enjeux
Manette en main, Anthology of Fear s’apparente moins à un jeu qu’à une déambulation vide, un simulateur de marche dénué de tension, d’interaction ou d’épreuves mémorables.
Votre progression se limite à avancer, observer quelques éléments disséminés çà et là, et résoudre des énigmes sans substance, tantôt simplistes, tantôt absurdes dans leur exécution. Pas d’ennemis, pas de survie, pas même de menace insidieuse pour troubler votre avancée : juste un terrain vague traversé dans l’indifférence.
Les rares tentatives de provoquer un frisson se traduisent par des jump scares aussi convenus que bâclés, recyclant les pires artifices du genre sans le moindre soupçon de subtilité. Même les mannequins, censés figurer l’étrangeté ou la terreur, n’arrachent qu’un haussement d’épaule, tant leur surgissement est téléphoné.
Une façade qui craque sous le poids du vide
Sur le plan visuel, Anthology of Fear affiche des ambitions modestes mais relativement correctes, surtout pour une production indépendante. Les décors, bien que figés et dépeuplés, bénéficient d’une direction artistique sobre mais convenable, assez pour ne pas heurter l’œil au premier regard.
Mais dès que l’on gratte la surface, les failles s’accumulent. Le portage Nintendo Switch, bâclé avec une nonchalance déconcertante, plombe l’ensemble sous des chutes de framerate régulières, un aliasing omniprésent et des textures qui bavent au moindre zoom. En mode TV, le spectacle devient presque pénible, là où le mode portable parvient péniblement à limiter les dégâts sans véritablement sauver l’expérience.
Côté sonore, l’atmosphère reste désespérément plate. Pas de nappes angoissantes, pas de textures sonores immersives : juste un silence pesant entrecoupé de quelques effets sonores sans âme, incapables d’instaurer la moindre tension authentique.
Le cadre aurait pu être propice à l’angoisse. Il devient un théâtre désaffecté, où ni l’image ni le son ne savent invoquer autre chose que le néant d’une frayeur simulée.
Un squelette vidé de substance
Anthology of Fear trahit à chaque instant les promesses de son propre genre. Pensé pour être une expérience d’horreur intimiste, il se révèle incapable d’instaurer la moindre tension, de proposer un gameplay significatif, ou même de justifier sa propre existence vidéoludique.
La durée de vie famélique — à peine deux heures — n’est en soi pas un problème pour ce type de production. Mais encore faudrait-il que ces deux heures soient denses, marquantes, habitées. Ici, elles s’écoulent dans une apathie totale, sans défi, sans enjeux, sans émotion.
Même sa traduction française, pourtant correcte, ne suffit pas à masquer le vide sidéral du contenu. Chaque énigme bancale, chaque séquence avortée, chaque sursaut prévisible creuse un peu plus le gouffre d’indifférence dans lequel le joueur finit par tomber.
Quant au portage sur Switch, il achève de sceller le sort du titre : ralentissements, graphismes dégradés, optimisation absente, une exécution aussi défaillante que le fond qu’elle peine à transporter.
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