Parmi les galaxies de l’indépendance vidéoludique, quelques étoiles parviennent à scintiller plus fort que d’autres grâce à une seule force motrice : la passion. Avec 20XX, Batterystaple Games trace une ligne droite vers le cœur des joueurs nostalgiques de Mega Man X, en lui offrant non pas un succédané mais un hommage vibrant, sous forme de Roguelite nerveux. Sorti le 10 juillet 2018 sur Nintendo Switch, après une première escale sur PC, ce titre co-développé avec Fire Horse Games transforme chaque saut, chaque tir, chaque dash en une déclaration d’amour à l’ère 16/32 bits.
Deux androïdes, une arche orbitale, une humanité à sauver, et des niveaux générés à la volée : les ingrédients de 20XX s’alignent dans une symphonie calibrée pour les amateurs de défi, de réactivité et d’améliorations à enchaîner. Peu relayé par la presse, mais chéri par les connaisseurs, le jeu ne demande qu’une seule chose à chaque joueur qui franchit ses portes : êtes-vous prêt à prouver, pixel après pixel, que la précision fait la loi ?
Deux silhouettes chromées face à l’extinction programmée
Dans les hauteurs silencieuses d’une station orbitale nommée l’Arche, deux entités mécaniques s’éveillent. Nina et Ace, héritiers assumés de X et Zero, incarnent la dernière ligne de défense face à un soulèvement robotique qui menace les fondations même de l’humanité. Propulsés dans un monde fragmenté, généré à chaque tentative, ces deux combattants n’avancent pas pour faire triompher un récit, mais pour inscrire leur propre trace dans une succession de missions sans retour.
L’intrigue de 20XX tient dans les marges. Elle évoque une menace globale, un danger systémique, un conflit machine contre machine. L’essentiel se joue ailleurs, dans l’intensité des actions et la cadence des affrontements. Les deux scientifiques qui vous guident depuis l’Arche, visiblement inspirés des figures emblématiques de Light et Wily, posent un décor à la fois familier et efficace. Ce cadre sert de fil rouge, de prétexte élégant pour relancer la machine à chaque run, sans jamais freiner l’élan de la mécanique centrale.
Ce minimalisme narratif ne trahit pas une absence, mais une volonté claire : laisser le gameplay écrire l’histoire, run après run, boss après boss. Chaque niveau devient une séquence narrative émergente, chaque pouvoir acquis une page supplémentaire. L’univers, s’il ne se développe pas dans les dialogues, se révèle dans les clins d’œil, les références visuelles, les silhouettes de vos adversaires, et la progression constante qui transforme chaque tentative en chapitre actif.
Le rythme des machines et la danse de l’acier
20XX bâtit son essence sur un principe simple et magistralement exécuté : reproduire les sensations d’un Mega Man X en les propulsant dans un écrin Roguelite. Dès l’entrée dans l’Arche, tout s’articule autour d’un cycle clair et efficace. Vous choisissez votre personnage, définissez vos préférences, débloquez quelques améliorations persistantes, puis plongez dans une série de niveaux générés procéduralement. La boucle est immédiate, gratifiante, et sans détour.
Chaque environnement propose ses propres règles de terrain, ses pièges, ses structures et ses adversaires. Vous sautez, tirez, dashez et adaptez votre stratégie en fonction de vos trouvailles. À la manière d’un Hades, chaque run est unique, marquée par les pouvoirs acquis, les armures équipées et les modules choisis. Quatre pièces d’équipement – casque, torse, bras, jambes – viennent modifier profondément votre manière de jouer. Une paire de bottes qui prolonge le saut, un torse qui immunise aux chutes, un bras qui renforce vos attaques chargées : tout influence votre façon d’aborder l’obstacle.
Le cœur du gameplay bat à pleine vitesse. Nina privilégie les attaques à distance, Ace excelle dans le corps-à-corps, et tous deux partagent une maniabilité exemplaire. Chaque pression de touche déclenche une action nette, précise, sans latence. La sensation de contrôle est absolue, presque chirurgicale. Cette lisibilité parfaite permet de se concentrer sur l’essentiel : l’apprentissage du rythme, l’observation des patterns, et l’exécution millimétrée. Le jeu demande de la rigueur et récompense l’audace.
Les boss, nombreux, imposent leur présence avec des patterns distincts, chacun déposant un pouvoir à la fin du combat. Ces capacités, mappables sur plusieurs touches, offrent une progression tangible et modulent l’approche des biomes suivants. Certains pouvoirs projettent des vagues d’énergie, d’autres invoquent des projectiles secondaires, d’autres encore modifient votre mobilité. À cela s’ajoute un système de défis, appelés « Glory Zones », qui proposent de courts niveaux optionnels à difficulté accrue. En réussir un ouvre l’accès à des bonus puissants. En échouer un met fin à la run. La tension est constante.
La verticalité des niveaux, la réactivité des ennemis, les plateformes mouvantes et les objets à collecter composent une chorégraphie millimétrée. Chaque pas, chaque saut, chaque tir fait partie d’une partition précise. Les distributeurs automatiques, les boulons à collecter, les jetons à conserver d’une run à l’autre structurent un système de progression hybride où s’imbriquent l’instantané et le durable.
Enfin, un mode coop local complète l’expérience, permettant à deux joueurs de parcourir ensemble les couloirs générés à la volée, en coordonnant leurs actions et en partageant les trouvailles. Cette option donne au jeu une dimension supplémentaire, sans jamais rompre son équilibre.
Des néons pour seules étoiles dans la nuit des machines
20XX adopte une direction artistique volontairement stylisée, où chaque contour semble tracé au scalpel numérique d’un esprit rétro-futuriste. Les décors mêlent plateformes technologiques, couloirs métalliques et fonds abstraits dans une palette saturée de bleus électriques, de verts acides et de rouges pulsés. Chaque biome affirme son identité visuelle à travers des teintes dominantes et des éléments de décor spécifiques, qu’il s’agisse de laboratoires suspendus, de ruines industrielles ou de zones glaciaires éclatantes. L’ensemble forme un univers cohérent, pensé pour l’efficacité de lecture autant que pour l’hommage visuel.
Les personnages, à commencer par Nina et Ace, arborent des silhouettes immédiatement reconnaissables, aux animations fluides et nerveuses. Chaque mouvement traduit un degré élevé de maîtrise technique, du dash foudroyant à la charge d’arme énergétique. Les ennemis, variés dans leurs comportements, possèdent des design lisibles qui permettent une identification instantanée de leurs capacités. Les boss, massifs et dynamiques, dominent l’écran par leur présence et leur palette d’attaques, sans jamais rompre la clarté visuelle du combat.
Côté effets, les explosions, projectiles et transitions lumineuses s’intègrent avec précision à l’action, assurant un retour visuel immédiat à chaque déclenchement de compétence ou de loot. L’interface, sobre et bien agencée, soutient l’expérience sans jamais l’alourdir. Les menus de l’Arche, les écrans d’amélioration, les tableaux de statistiques se manipulent avec une simplicité intuitive, pensée pour les cycles rapides de relance.
La bande-son, quant à elle, suit un rythme électro rétrofuturiste, conjuguant synthés percussifs, basses vibrantes et nappes digitales entêtantes. Chaque biome possède sa propre variation musicale, accentuant la progression avec une tension ascendante. Les sons des armes, des bonus, des ennemis vaincus s’ajoutent à cette orchestration numérique, avec une justesse calibrée. Les musiques de boss montent en intensité pour souligner les pics de difficulté, sans jamais masquer les sons du gameplay.
L’identité sonore de 20XX complète parfaitement sa proposition visuelle : une course mécanique vers la maîtrise, enveloppée dans une esthétique sonore à la fois nerveuse, précise et entêtante.
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