Sorti le 13 juin 2025, The Alters s’est rapidement imposé comme une œuvre de science-fiction ambitieuse, centrée sur la survie psychologique d’un homme confronté à ses doubles. Mais à peine deux semaines après sa sortie, le jeu de 11 bit studios s’est retrouvé au cœur d’une controverse inattendue. Plusieurs joueurs ont détecté des éléments suspects dans certaines textures : des fragments de prompt générés par IA, visibles à l’écran sans retrait graphique.
Exemple révélateur : une texture comportait la phrase en anglais « Sure, here’s a revised version focusing purely on scientific and astronomical data », typique d’un retour de chatbot textuel. À cela se sont ajoutées des localisations manifestement erronées dans certaines langues, notamment en portugais brésilien, en russe ou en allemand. Certaines de ces traductions contenaient elles aussi des fragments bruts de prompts, traduits littéralement.
Face à l’indignation croissante de la communauté — relayée sur Steam, Bluesky et Reddit — et en vertu de la politique désormais imposée par Steam depuis janvier 2024 (obligation de déclarer tout contenu généré par IA), le studio a publié un communiqué détaillé le 30 juin 2025.
Un texte IA oublié dans le décor
Le premier point abordé par 11 bit studios concerne un unique texte généré par intelligence artificielle, intégré par erreur dans une texture secondaire du jeu. Ce contenu, censé être un simple placeholder utilisé par un designer graphique en phase de prototypage, n’avait jamais vocation à figurer dans la version finale.
Le studio reconnaît une faille de validation dans le pipeline de production. Le texte fautif, une ligne décorative placée sur un mur, est resté par inadvertance. L’équipe assure qu’il s’agit d’un cas isolé, et qu’une révision complète du jeu a confirmé l’absence d’autres erreurs similaires. L’élément en question est d’ores et déjà en cours de correction via une mise à jour.
Des vidéos traduites par IA sous pression
La seconde utilisation de l’IA concerne les séquences vidéo visibles dans l’espace social de la base, que les alters peuvent visionner. Produits en externe et ajoutés à la toute fin du développement, ces contenus ont nécessité une localisation rapide. Sous contrainte de temps, l’équipe a fait le choix d’un outil de traduction automatique pour fournir une version multilingue de ces dialogues.
11 bit studios précise que ce choix n’était pas censé être définitif : des relectures humaines par leurs partenaires de localisation étaient prévues pour après le lancement. Ce processus de révision manuelle est actuellement en cours, avec déploiement progressif dans les prochaines mises à jour. Le studio admet toutefois que cette décision, même temporaire, aurait dû être communiquée en amont aux joueurs.
0,3 % du jeu, mais 100 % de méfiance
Pour tenter d’objectiver l’ampleur de l’impact, 11 bit studios avance un chiffre précis : les vidéos concernées représentent environ 10 000 mots sur un total de 3,4 millions dans toutes les langues, soit 0,3 % du texte global du jeu. Le studio indique avoir préféré cette solution plutôt que de laisser les vidéos en anglais uniquement, ce qui aurait nui à l’expérience des non-anglophones.
En rétrospective, il concède que cette décision, bien qu’intentionnée, était une erreur — non pas technique, mais éthique : « Peu importe notre décision finale, nous aurions dû simplement vous en informer », écrit le studio dans un ton volontairement humble.
Un débat plus large sur les usages de l’IA
Le communiqué se conclut sur une reconnaissance des défis émergents liés à l’IA dans la production vidéoludique. Si l’erreur matérielle a été circonscrite, l’affaire soulève une question de fond : comment intégrer des outils automatisés sans trahir l’esprit de fabrication artisanale auquel le studio se dit attaché depuis ses débuts (This War of Mine, Frostpunk).
Le studio affirme revoir actuellement ses procédures internes, dans un objectif de clarté et d’intégrité, en promettant une transparence accrue à l’avenir. Un engagement qui devra désormais être mesuré non plus à l’aune des intentions, mais des pratiques concrètes.
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