Développé par Dustwind Studios en collaboration avec Z-Software, Dustwind: Resistance est sorti le 18 juin 2025 sur Xbox Series. Héritier solitaire d’un titre multijoueur confidentiel, ce spin-off s’émancipe de la mêlée pour proposer une campagne tactique en solitaire, dans un monde où les cendres parlent plus fort que les vivants.
Mais ce retour à l’isolement stratégique parvient-il à raviver les braises d’un genre trop souvent oublié, ou ne fait-il que recycler les décombres d’une guerre déjà perdue ?
Un cri dans les ruines
Dans Dustwind: Resistance, vous incarnez une survivante sans nom, échappée d’un camp d’esclavagistes et déterminée à se venger d’un monde qui ne lui a laissé que la douleur et la rage. Ce point de départ, d’une brutalité sèche, pourrait faire naître un récit fort, viscéral, taillé dans les os du post-apocalyptique. Mais l’écriture reste dans les clous d’un cahier des charges prévisible, où chaque rebondissement semble dicté par une logique de vengeance mécanique plus que par un désir de narration incarnée.
La protagoniste parle peu, mais agit avec une détermination glaciale. Ce mutisme pourrait nourrir un propos sur la solitude, sur la guerre intérieure d’un être broyé par la violence. Pourtant, le jeu ne prend jamais le risque d’approfondir ce vide. Les rares dialogues, livrés à l’écran sans doublage, oscillent entre fonctionnels et impersonnels. Ce silence du texte tue l’impact émotionnel, là où le contexte aurait mérité des mots lourds, tranchants, mémorables.
Les personnages secondaires, quand ils existent, ne sont que des silhouettes croisées sur le chemin de la résistance : recrues temporaires, silhouettes armées, voix éteintes. Aucun n’a de véritable arc, aucune relation ne se tisse, aucune tension n’émerge. Même le chien Diesel, pourtant compagnon de route fidèle, n’est jamais plus qu’un outil de gameplay, jamais un partenaire de drame ou d’émotion.
L’univers, lui, se devine plus qu’il ne se raconte. Le monde a sombré, les factions s’entredéchirent, la survie justifie tout. Mais ce cadre n’a ni chair ni mémoire. Pas de journaux à lire, pas de voix à écouter, pas de mythologie à décrypter. Juste des ruines génériques et des ennemis à abattre. Là où d’autres jeux bâtissent leur tension sur les non-dits, Dustwind: Resistance se contente de tout réduire au minimum syndical narratif.
Le jeu traverse son propre scénario comme un survivant traverse un champ de mines. Avec méthode, mais sans passion. Ce n’est pas une histoire qu’on nous raconte. C’est une mission qu’on nous assigne.
Un combat figé dans l’instant
Dustwind: Resistance repose sur un système de stratégie en temps réel avec pause tactique, où chaque escarmouche se joue à la précision d’un ordre, à la bonne utilisation d’un angle de tir, à la couverture que vous parviendrez à maintenir dans un décor criblé d’impacts. La promesse est celle d’un Commandos post-apocalyptique, resserré sur une poignée d’unités aux capacités variées, évoluant dans des cartes linéaires à objectifs fixes.
Sur le papier, l’équilibre est juste. Chaque mission propose une configuration claire : infiltration discrète, assaut frontal, évacuation sous pression. Mais la variété reste superficielle. Très vite, les mécaniques tournent en boucle : déplacement en escouade, élimination ciblée, récupération de ressources, progression méthodique. L’IA ennemie, peu réactive et trop prévisible, réduit les affrontements à des puzzles balistiques, où l’expérimentation cède le pas à la répétition.
La pause active, cœur du système, permet de planifier chaque action avec minutie. Positionnement, déclenchement simultané, enchaînement des tirs : tout peut être contrôlé avec une froideur chirurgicale. Mais cette maîtrise totale tue toute tension. Là où elle devrait permettre des improvisations brillantes ou des retournements désespérés, elle devient un confort de pilotage, un filet de sécurité qui anesthésie le risque.
Chaque personnage possède des capacités spécifiques – soins, réparation, pose de pièges – mais leur utilisation reste fonctionnelle. On ne développe aucune stratégie évolutive, aucun style de jeu personnel. La progression est bloquée sur des rails : peu d’améliorations, peu de choix, peu de liberté tactique. La campagne se contente d’enchaîner les cartes sans jamais faire monter la pression ou bouleverser les codes établis.
L’interface, pensée pour la manette, fait le travail sans briller. Sélection des unités, gestion des actions, navigation dans les menus : tout est utilisable, mais rien n’est intuitif ou rapide. L’ergonomie sacrifie la précision du PC au profit d’une accessibilité minimale sur console, ce qui nuit à la fluidité des décisions en pleine action.
L’absence de système de rejouabilité – pas de notes de mission, pas de défis alternatifs, pas de scoring – condamne le jeu à une consommation unique, sans retour. Une fois l’objectif atteint, il n’y a rien à revivre, aucun levier mécanique qui donnerait envie de rejouer différemment.
Dustwind: Resistance propose une boucle tactique rigoureuse, mais figée. Ce n’est pas un champ de bataille mouvant, mais un échiquier poussiéreux, où chaque coup est joué par automatisme plutôt que par nécessité.
Des cendres sans lumière et un silence sans colère
Visuellement, Dustwind: Resistance adopte une esthétique post-apocalyptique, mais sans souffle ni tension. Le monde est un cimetière d’autoroutes brisées, de bunkers déchus, de hangars éventrés par la rouille et le temps. Rien de plus, rien de moins. Les décors, statiques et mornes, reproduisent à la chaîne les clichés du genre, sans jamais chercher à les détourner ou à les sublimer.
La palette chromatique se résume à un dégradé de terres mortes : ocres poussiéreux, gris métalliques, verts militaires. Aucun contraste, aucune audace. Chaque carte semble recyclée de la précédente, modifiée à la marge pour servir un objectif unique. Le jeu fonctionne comme une grille tactique, jamais comme un monde que l’on arpente avec curiosité.
Les modèles 3D sont corrects, mais rigides. Les animations, minimales. Les effets visuels des tirs, des explosions ou des interactions sont dépouillés, souvent invisibles à distance. Les impacts de balles ne laissent que peu de traces. Les corps tombent sans violence. Même la mort est traitée avec tiédeur. Rien n’est mis en scène, rien ne claque, rien ne choque.
Du côté sonore, le constat est plus brutal encore. Dustwind: Resistance est presque muet. La bande-son, présente mais discrète, s’efface derrière des nappes ambiantes génériques. Aucune montée en tension, aucun thème marquant, aucun rythme ne vient soutenir l’action ou souligner un moment clé. Le silence n’est pas ici un choix artistique. C’est un oubli.
Les effets sonores, eux aussi, manquent de corps. Les fusillades résonnent comme des pétards humides. Les cris d’agonie sont rares, les explosions étouffées, les ambiances absentes. Il n’y a ni vent dans les ruines, ni échos dans les cavernes. Le monde est sourd, fermé sur lui-même, incapable de vibrer.
Quant au doublage, il est purement inexistant. Aucun personnage ne parle à voix haute. Toutes les interactions passent par des lignes de texte silencieuses, écrites sans panache ni personnalité. Là où une voix, une intonation, une respiration auraient pu insuffler un peu d’humanité, le jeu choisit le mutisme total. Un mutisme qui écrase toute tentative d’émotion ou de tension dramatique.
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