Disponible depuis le 27 avril 2021 sur Nintendo Switch, Death end re;Quest est une tentative ambitieuse de Compile Heart pour sortir de son cadre habituel de productions confidentielles et imposer une licence forte sur la scène internationale.
Porté par un concept original, oscillant entre RPG classique et visual novel d’enquête, le titre promet une expérience hybride où bugs, corruption numérique et mystères se mêlent dans un univers aussi fascinant que déroutant.
Mais derrière ses ambitions narratives et sa structure intrigante, Death end re;Quest parvient-il à conjuguer toutes ses idées sans vaciller sous leur propre poids ?
Piégés dans un monde en ruine
Death end re;Quest plonge le joueur dans un récit dense et labyrinthique, à cheval entre réalité et virtualité.
Vous suivez Shina Ninomiya et Arata Mizunashi, deux développeurs autrefois chargés de créer le MMORPG révolutionnaire World’s Odyssey.
Mais le projet a tourné au cauchemar : Shina a mystérieusement disparu, et son avatar erre toujours dans un monde dévasté, gangrené par des bugs et des forces hostiles.
En alternant les points de vue entre Shina, perdue dans cet univers virtuel devenu incontrôlable, et Arata, resté dans le monde réel pour tenter de comprendre l’origine du désastre, Death end re;Quest brouille habilement les frontières entre le jeu et la réalité.
La structure narrative, scindée entre exploration RPG et séquences de visual novel, permet un double récit captivant, où chaque avancée dans l’un influence l’autre.
L’intrigue, riche en ramifications, n’hésite pas à évoquer des thèmes sombres – isolement, manipulation, perte de repères – tout en tissant des mystères haletants autour de la disparition de Shina et de la corruption du monde virtuel.
Malgré une narration parfois brouillonne, alourdie par la complexité des embranchements et une gestion peu fluide des transitions, l’univers de Death end re;Quest reste profondément fascinant, porté par des personnages crédibles et attachants.
Le principal écueil reste l’absence de traduction française, particulièrement préjudiciable pour un jeu aussi verbeux.
La densité des dialogues et l’importance des choix narratifs exigent un très bon niveau d’anglais pour pouvoir pleinement apprécier la richesse de l’histoire, sans quoi l’expérience devient rapidement frustrante et opaque.
Malgré ses maladresses, Death end re;Quest réussit à proposer un récit intense et inhabituel, loin des sentiers battus du JRPG classique, au prix toutefois d’une accessibilité réduite.
Un RPG sous influence, pris entre deux mondes
Dans Death end re;Quest, le gameplay se divise entre deux expériences distinctes mais intimement liées : d’un côté, l’exploration d’un monde virtuel corrompu à travers des phases de RPG classiques ; de l’autre, des séquences d’enquête sous forme de visual novel, ancrées dans le monde réel.
Ce choix de structure audacieux donne au titre une saveur hybride singulière, renforçant son atmosphère de mystère permanent.
Les phases RPG s’appuient sur un système de combat au tour par tour enrichi d’une mécanique de déplacement libre sur le champ de bataille. Chaque personnage peut se repositionner avant d’attaquer, ajoutant une dimension stratégique bienvenue.
À l’issue d’une séquence d’attaques, l’ultime coup porte souvent une projection de l’ennemi, permettant de le faire rebondir contre les murs de l’arène, contre d’autres adversaires ou même de déclencher des attaques réflexes.
Sur le papier, cette idée vise à dynamiser les affrontements, en transformant les combats en jeux d’angles et de trajectoires.
En pratique, la mise en œuvre révèle des limites gênantes : les rebonds souvent exagérés et la collision avec des murs invisibles nuisent à la crédibilité des affrontements, donnant parfois l’impression de voir évoluer des personnages dans un flipper mal calibré.
En parallèle, les phases d’enquête incarnées par Arata proposent une respiration narrative plus calme.
Ici, pas de combat, mais de longues discussions, des choix à faire et une collecte minutieuse d’indices pour percer les secrets du projet W.O.D. et tenter de sauver Shina.
La tension reste palpable, car chaque décision peut orienter l’intrigue vers des chemins différents, renforçant l’impression d’un récit vivant et imprévisible.
Néanmoins, malgré cette complémentarité théorique, le passage d’un mode à l’autre souffre parfois d’un manque de fluidité.
Les séquences de visual novel, bien que passionnantes dans leur construction, peuvent s’étirer sur des durées excessives sans progression ludique notable, ralentissant le rythme général du jeu.
De même, certaines explorations dans le monde virtuel auraient gagné à proposer des variations plus marquées pour éviter la lassitude.
Death end re;Quest propose donc un gameplay riche en intentions mais imparfait dans son exécution, tiraillé entre des phases de RPG classiques audacieusement modifiées et des séquences narratives parfois trop pesantes.
Un monde virtuel aussi séduisant que chaotique
Visuellement, Death end re;Quest affiche des ambitions certaines malgré les limites techniques habituelles des productions Compile Heart.
Le jeu séduit d’abord par ses nombreuses cinématiques, ses illustrations soignées et la richesse de ses character designs, fidèles à l’esthétique manga stylisée chère au studio.
Chaque personnage principal bénéficie d’un soin particulier, avec des expressions bien travaillées et des postures qui traduisent efficacement leur personnalité, renforçant ainsi l’attachement du joueur à cet univers troublé.
Les environnements, pour leur part, oscillent entre inspirations réussies et réalisations plus bancales.
Si certains lieux corrompus de World’s Odyssey dégagent une atmosphère inquiétante et crédible, d’autres paraissent fades ou génériques, peinant à maintenir la tension promise par l’intrigue principale.
L’idée de représenter la dégradation du monde par des artefacts graphiques verts disséminés dans l’espace est louable sur le principe, mais leur surabondance, totalement aléatoire, finit par devenir envahissante.
Plutôt que de renforcer l’immersion dans cet univers détraqué, ces effets parasitent parfois la lisibilité de l’action, transformant l’exploration en un exercice de patience inutilement frustrant.
Techniquement, le portage Nintendo Switch s’en sort honorablement.
Les performances restent stables, les temps de chargement sont raisonnables et, contrairement à d’autres productions du studio, aucun bug majeur ne vient entacher l’expérience.
Le jeu parvient à conserver sa fluidité même lors des combats plus chargés, un point qui mérite d’être salué tant il est rare sur cette plateforme pour des productions issues de Compile Heart.
Côté bande-son, Death end re;Quest se montre globalement plus discret.
Les thèmes musicaux, souvent sombres et mélancoliques, accompagnent l’action sans jamais la submerger.
Ils parviennent à instaurer une tension latente bienvenue, mais manquent de compositions vraiment mémorables capables de marquer durablement l’esprit du joueur.
Les doublages japonais, eux, sont solides et crédibles, apportant une véritable intensité émotionnelle aux scènes clés, tandis que les bruitages, sans être exceptionnels, remplissent leur rôle sans heurt.
Dans l’ensemble, Death end re;Quest propose un habillage soigné mais perfectible, oscillant entre éclairs de maîtrise artistique et maladresses de réalisation, à l’image même de son ambition de mêler virtuel et réel dans un même souffle.
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